mercredi 27 octobre 2010

Clip de Loki Starfish sur Goudrome

Souvenez-vous... Aux Açores, lorsque Julien et Héloïse nous ont rendu visite, ils arrivaient avec un projet et leur petite caméra Super 8. Entre navigations inter-îles, soirées sur les bateaux des voisins et quelques Amendoa Amarga en écoutant du fado, voici le fruit de nos aventures en images, pour le clip de Loki Starfish.

Loki Starfish - On the verge from Loki Starfish on Vimeo.


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samedi 18 septembre 2010

100 jours en mer / un an sur un voilier

(photo prise par Brice, lors de notre dernière navigation
d'Ars en ré à La Rochelle, avec Jean-rené)


Voilà venu le temps des conclusions, ou l’occasion d’apporter des réponses aux questions récurrentes entendues depuis notre retour parmi vous.
En réalité, deux questions fondamentales traduisent vos inquiétudes, elles sont réellement liées aux caractères de chacun des sexes.
La première concerne la gente féminine qui s’interroge sur la vie pratique à bord (sous chaque aspect et…toujours dans le détail).
Le point de vue masculin, en revanche est beaucoup plus général et se tourne vers le visage de la mer : "Vous avez eu de la grosse mer, des tempêtes ?".
C’est très intéressant de voir à quel point l’imagination peut compléter un récit.
Pour faire simple, ce post sous forme de question-réponse a pour seul but d’éclairer ceux qui préparent un voyage en bateau ou de permettre à ceux qui n’ont pas suivi le périple de découvrir la mer à travers un prisme particulier. Je vais donc décrire ici des choses vécues avant et pendant notre parenthèse sur l’eau: le départ, la voile, la vie à bord, la pêche, le couple, etc



Partir un jour, oui mais…

Pour commencer, il est intéressant de préciser que prendre la mer en voilier ne requiert ni permis ni diplôme pour la majorité des pays européens…
La mer est encore un terrain de liberté immense. Pour la petite histoire, nous avons quitté la Turquie sans pavillon national et sans "immatriculation" du bateau. Plus précisément le nom et le port d’attache de Goudrome n’étaient indiqués nulle part !
Près d’un an sur les flots avec pour seuls contrôles, un avion militaire grec envoyé à nos trousses nous priant de libérer une zone de tir et deux contrôles "de routine" des douanes françaises (uniquement par radio en Martinique et Guadeloupe…).
Nous sommes encore loin des ronds-points et les contrôles de vitesse en mer ?

La porte est grande pour prendre le large ! Quelle peut être la raison du si peu de monde sur les océans alors que l’eau représente 70% de l’espace de la planète ?
La mer fait peur, l’homme a peur ?
Nous n’oublierons jamais le nombre d’avis partagés, très partagés des amis et autres connaissances. On a tout entendu, le pur jus des angoisses acides entretenues par les médias et la littérature maritime. Si on s’en tenait aux discours de nos proches effrayés par l’inconnu, nous serions partis à bord d’un bunker flottant conduit évidemment par un skipper professionnel diplômé. Suivi de près par un médecin, une pharmacie, une plateforme de communication internet par satellite, un container frigorifique et on aurait installé le chauffage au sol.
Avant de larguer les amarres, certainement l’étape symbolique la plus difficile à dépasser, nous devions commencer par répondre aux inquiétudes…des autres.

Il y avait aussi l’avis de Jean-René, qui ne nous cachait pas son étonnement en constatant chez nous l’absolue inexistence de culture maritime, mais qui ne semblait pas inquiet au sujet de la navigation. Mon statut de bricoleur ayant selon lui beaucoup aidé. Avec lui, d’autres ayant de l’expérience nous rassuraient.

Pour nous, larguer les amarres c’était couper le fil qui vous lie à la famille, aux amis mais surtout le lien d’une réalité confortable où tout est organisé pour vous rassurer.
Faire une pause, interrompre le processus de la consommation outrageuse et réfléchir sur nos abus. Prendre le large pour repousser les murs des idées reçues, prendre du recul sur notre condition. Si nous ne sommes pas partis en vacances, nous sommes partis en voyage. La différence fondamentale, selon moi, réside dans la disposition à prendre du temps. Un billet de retour grignote la liberté, annule une part d’imprévu…
Abandonner réellement son téléphone, son trousseau de clefs pour se retrouver les poches vides constituent des actes vraiment libérateurs.

Nous l’avons donc choisi l’imprévu en optant pour le mode de transport, le plus lent et fastidieux qui nous soit donné ici bas.
Naviguer, c’est un mode de vie en soi tant la notion de navigation est indissociable de la notion de nature. La "Nature" au sens le plus large, les éléments avec qui il faut apprendre à vivre, ces éléments dans leur grandeur qui nous enseignent l’humilité: le vent, le sel, le mouvement des masses d’eau, les températures, et puis simplement le cycle des astres avec lequel il faut composer.

Comment ça marche le bateau ?

Pour ce qui est du moyen de transport, Raphaël (l’ami qui m’a accompagné jusqu’à Malte pendant que Laurène sciait les dernières branches de notre enracinement terrien) n’a pas pu ignorer le peu de compétences que j’affichais clairement.
Aujourd’hui, le fragile équilibre des premiers pas me fait sourire (j’espère qu’il en est de même pour Raph ) tant il y avait de la place pour la naïveté et l’expression créative…
Les centaines de mètres de bouts à installer, un nombre incalculable de pièces dont j’ignorais totalement la fonction. Un peu comme ces meubles à monter chez soi pour lesquels il y a toujours des pièces en trop, là il fallait faire marcher un bateau à tâtons, sans mode d’emploi.
Autant dire que l’armement de Goudrome comme les premiers miles nautiques ont été longs et plein de surprises !
A force de patience et d’observation on découvre que notre moyen de transport est simplement comme un instrument à vent. Au début on répète les gammes et petit à petit on compose.
Enfin, il faut savoir que c’est un vrai boulot de déplacer sa maison sur les flots, le vent est parfois capricieux…
Si les mollets du cycliste réclament des changements de pignons en fonction du relief. En voilier, on dimensionne les voiles en fonction de la force du vent, on réduit quand ça grimpe et on envoie tout quand ça descend.

Mais c’est comment à bord ?

Pour ce qui est de "la maison", on dit du plan romanée que c’est un plan très habitable (10 mètres de long pour 3,5 de large). Déjà, nous étions privilégiés car on tient debout partout (ce n’est pas le cas de tous les voiliers du genre). Il est effectivement très spacieux.
Pour la vie pratique, nous avions 400 litres d’eau claire répartie dans deux réservoirs inox, nous puisions l’eau via une petite pompe à pied.
Une bouteille de gaz alimentait deux feux posés sur un système basique à balancier. Pas de frigo, pas de désalinisateur, pas de douche ni W.C (plus de détails dans la rubrique "la visite" à droite).

Qu’est-ce qu’on mange en mer?

C’est très simple, à chaque escale on fait le plein (eau, carburant, vivres et on boucle par le frais avant le départ).
Laurène s’est complètement prise au jeu, dès son arrivée à Malte elle a commencé à bourrer les placards. Nos greniers étaient donc à l’image (version conserve) de notre parcours, depuis la Turquie et la Grèce, en passant par l’Italie et l’Espagne, les produits du bassin méditerranéen avaient trouvés chez nous un bel étage !
On déguste encore du café du Cap Vert et un délicieux sucre de canne. Que dire des Rhums arrangés Martiniquais, du chocolat et des épices de Grenade, c’est autant de saveurs et de parfums pour ouvrir le champ de la cuisine créative.
Il y a aussi les vins, comment ne pas en parler ?
A travers une boisson comme le vin, on a pu comparer l’expression des terroirs : du sol à la vigne mais aussi et surtout des hommes qui la cultivent. A l’heure de la mondialisation et de l’harmonisation du goût, nos échantillons de dégustations se sont avérés riches de particularités, mêmes si l’élixir "idéal" français constituait un point fort de magnétisme, une étoile de référence lointaine. Nous avons donc conservés et dégustés quelques flacons (toujours aux escales, en mer c’était plutôt une exception…)

On mange simple et de saison : c’est le frais qui dicte le menu. Sans frigidaire, l’état avancé d’un fruit ou d’un légume vous suggère un plat. Mis à part la viande, il n'y a rien que nous n'avons pu conserver en mer. Charcuterie, oeufs, lait UHT, beurre frais, fromage, et même les yaourts se conservent 20 jours! En général, les longues traversées creusent l’estomac, on se nourri avec plaisir sans prendre un kilo, cela serait plutôt l’inverse.

Pour les recettes, Laurène a tenu à jour le blog Made In Cambuse)
Comment ça se passe la nuit ?

Comme en tout point sur la planète, le soleil nous fait l'honneur d'un spectacle deux fois par jour. Pas un jour ne passe sans qu'on manque ce rendez-vous.
Nous n'avions ni radar, ni d'autres moyens de nous signaler la présence de cargos (ou autres bateaux), sauf notre capacité à se relayer pour une veille. L'organisation n'a jamais été soumise à des règles, d'une manière générale celui qui est de quart gère deux choses : la sécurité et le sommeil de l'autre. Le principe pour la nuit est simple, tant qu'on peut veiller on laisse l'autre dormir. Cela varie entre deux et huit heures, avec une veille tous les quarts d'heure minimum. Ceci est donc bien le seul exercice qui nécessitait une montre à bord, et contrairement à ce que l'on peut croire cela n'a jamais été pesant. La notion de sommeil en mer est gérée de façon beaucoup plus naturelle, et on considère les journées comme des entités de 24 heures.


Et la pêche ?

Beaucoup de marins pêchent quasiment au gré de leurs envies et profitent de la mer comme d’un grand rayon frais, nos prélèvements ne dépassent pas 15 kg pour 100 jours (dorades coryphènes, bonites et thon blanc). Ce n’est pas faute d’essais, nous avions presque toujours une ligne à la traîne et pouvons même parler d’un record : nous avons traîné un leurre (un genre de poulpe en plastique rouge qui dissimulait un hameçon d’environ cinq centimètres) sur près de dix mille kilomètres sans rien prendre !
Notre matériel était rudimentaire : du fil solide, un émerillon et un leurre (cuiller, poulpe ou rapala) et un hameçon.
Avec du recul, le constat est simple : notre leurre, comme l’hameçon étaient surdimensionnés et notre vitesse souvent trop faible (je rentrais la ligne à partir de 6 ou 7 nœuds, j’ai appris que le poisson mordait bien au-delà et que les petits leurre avaient beaucoup plus de succès).
Mais vivre sur l’eau c’est entrer dans une grande famille, nous avons donc partagé avec délectation le fruit de la pêche et de la chasse sous marine de nos voisins/amis (barracudas, perroquets, thazars, langoustes et même la cigale de mer !)
La variété est aussi immense que les mers sur lesquelles nous naviguions…
On n’oublie pas les cadeaux des pêcheurs de Favignana (et d’ailleurs) qui nous lançaient chaque jour une bonite dans l’annexe et nous offraient des sacs entiers de petits poissons!



Et le couple ?

La décision de partir en bateau fut un accouchement de nos esprits plus que de nos expériences de voiles réciproques. Nous ne savions ni l’un ni l’autre à quelle sauce nous allions être dégustés…
Finalement, l’ignorance est la clé de voûte de ce projet, la phrase culte du p’tit Gibus est souvent venue nous chatouiller les lèvres (et nous ne sommes pas les seuls) : " si j'aurais su j'aurais pas venu" !
Laurène est arrivée à Malte dans un mois d’octobre à moitié révolu… Quelques travaux en guise de bienvenue et nous partions hors saison sur une méditerranée désertée d’homologues à voiles. On se demande encore aujourd’hui quelle source nous a abreuvés pour sortir de là.
Les épreuves se dressaient comme des montagnes, nos conneries (le bout dans l'hélice à Favignana notamment), la météo (coup de vents, froid) qui repoussaient la porte libératrice de Gibraltar.
Et bien voilà, la recette est là, pile dans l’épreuve !
Nous n’étions que deux, une image illustre parfaitement le combat que nous menions: une nuit entière passée sur le pont à sauver (à la force de nos petites gambettes) notre embarcation qui menaçait de s’écraser sur un quai.
Pas besoin de promesses et encore moins de discours, nous étions deux, rien que deux !
Nous avons ainsi sillonné la méditerranée sans jamais croiser de voiliers, en ayant un but commun auquel accrocher nos espoirs.
L’épreuve du départ basculait enfin le 31 décembre à Carthagène (en Espagne) quand Laurène manifestait (avec un courage qui me fit tressaillir) clairement l’envie de poursuivre.

Passé le détroit de Gibraltar, les vents et courants devenaient favorables.
L’Atlantique devenait aussi un espace de convivialité, nous nous réjouissions autant de retrouver des gens sur notre chemin qu’au bord du chemin. Les rencontres des bateaux-stoppeurs finiront par nous faire baisser la garde jusqu’à ce que nous accueillions trois nouveaux membres d’équipage.
Un choix réfléchi, nous voulions que cette chance de naviguer soit partagée, ce fut une réussite même si notre couple était un peu en quarantaine.
Une petite pause en amoureux aux Antilles et puis le hasard réclamait que nous renouvelions l’expérience.
Finalement, accueillir nous rapprochait, nous offrait un autre regard.
A l’issue de ce parcours partagé, le calendrier tombait dans l’eau comme une pierre venant du ciel, c’était le temps de choisir, de décider de la suite du parcours.

Il y a eu des propositions, des envies et même la possibilité de s’installer au Sud de Grenade avec un petit boulot confortable…
Poursuivre sur le Pacifique (une fois de plus Jean-René était du genre à nous pousser de l’avant), passer une année supplémentaire en mer des Caraïbes en remontant via la Colombie, Panama, Nicaragua, Costa Rica, Belize, Honduras, etc
Telles étaient les pistes qui nous nourrissaient au fil des pages de l’atlas.
On a eu des rêves en commun puis la décision de rentrer, d’emmener Goudrome à La Rochelle où Jean-René l’attendait s’est imposée.
C’était plus sage, plus juste mais il nous a fallu rassembler une énergie démesurée pour contrer (une fois de plus) les angoisses des uns et des autres ajoutées à notre propre peur.
Puis on l’a fait, tous les deux, et on ne le regrettera jamais : quarante deux jours de mer avec une belle escale aux Açores qui nous a réellement comblé.
En mer, il y a eu des mots plus hauts, parfois des mots d’oiseaux, il y a eu des larmes aussi.
Mais ce qui reste après tout, ce serait plus les fous rires, les délires et les grands moments de tendresse.

L’océan, c’est comment ?

Les tempêtes, pas vu…
La notion de gros temps est tout à fait subjective, les uns vous diront qu’ils ont connu des creux énormes, des déferlantes dangereuses et entendu le vent hurler.
Notre expérience s’est étalée sur un peu moins d’un an, avec pour seule vraie contrainte de se trouver au bon endroit au bon moment.
A l’ instant où j’écris ces lignes, les Antilles sont en pleine saison cyclonique, le Golfe de Gascogne devient dangereux, c’est aussi la fin de saison en méditerranée.
Nous sommes partis un peu tard de Turquie, le "Meltem" faiblissait puis la météo devenait changeante, novembre et décembre n’étaient pas vraiment recommandés…
Et pourtant on s’en est sorti, pas de tempêtes, que des petits coups de vents que nous évitions au maximum grâce aux prévisions valables sur presque 72h, mis à part quelques exceptions la méditerranée peut se traverser en multipliant les escales.
La suite en Atlantique laisse un peu plus de place au hasard, une fenêtre météo permet de partir dans de bonnes conditions mais les garanties sur les longues navigations n’existent malheureusement pas (pas pour nous en tout cas, beaucoup de marins équipés utilisent un téléphone satellite pour actualiser leurs fichiers).
On a donc eu une bonne étoile, les navigations de 8, 10 puis 20 jours sans escales ont été plutôt douces.
Pour ceux qui ont suivi notre périple, les vents les plus forts et la mer qui va de pair, nous les avions au portant. Des amis ont enregistré 45 nœuds au maximum, et ce jours là Laurène avait de la musique dans les oreilles, elle trouvait ça beau (pour nous c’était difficile de traduire l’état de la mer et la force du vent, nous avions parfois des mesures en mer via les cargos, sinon c’était à l’arrivée à terre comme cette fois là grâce aux voiliers amis).
Le pire a été pour nous en quittant les Antilles, huit jours (il faut imaginer ce que représentent 192 heures !!) de près avec un vent qui n’a cessé de monter pour atteindre plus de trente nœuds…
Voilà un bon exemple, 30 nœuds c’est tout à fait supportable en théorie mais dans le nez avec la mer et la fatigue ça peut devenir dur.
Bref, parfois ça secoue, même pour un bateau comme Goudrome qui a un super comportement au près dans la bonne brise! En tout cas, on ne s’est jamais senti en danger.

Cette aventure si différente du quotidien ici pourrait être approfondie sous une multitude d’aspects supplémentaires…mais bon…
Laurène et moi sommes tout à fait disposés à répondre à ceux qui envisageraient de partir à la voile, on espère en tout cas que notre petit témoignage via ce blog aura un peu raccourci le grand pont qui nous sépare de l’Ouest …

Tout au long de l’année, j’ai pris un plaisir immense à écrire, la mer est un endroit idéal pour se libérer. En rédigeant cette note, quelque chose a changé, est-ce la stabilité du bureau ou l’instabilité de l’esprit bousculé par tant de retrouvailles ?
En laissant à Paris le soin de me toucher, et en me battant pour conserver les yeux du large, la plume n’aura qu’à choisir son chemin.



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mercredi 1 septembre 2010

La Rochelle - Saint Ouen

Après une dernière escale sur l'île de Ré que nous essayerons de vous raconter dans un prochain post, nous amarrons Goudrome pour de bon dans le bassin des chalutiers de La Rochelle. Cette fois c'est l'heure du grand départ, vers Paris...



On écrit une lettre à Jean-René, très émus par les dernières minutes à bord de Goudrome qui nous poussent vers la sortie. Un petit tour de clef dans le cadenas chinois boucle presque une année de « porte ouverte ».
Direction la gare de La Rochelle, je me retourne une première fois, une seconde, une troisième et chaque regard lancé vers le bateau ouvre le petit robinet des grands souvenirs…Regarder Laurène qui a, elle aussi, les yeux mouillés d’eau salée me pousse à déglutir et renifler d’avantage. Nous y sommes, Adieu bon Goudrome ! C’est comme dans un rêve, impossible de le crier…

17H06, voiture 19, place 61 et 64. Bienvenue dans le monde des chiffres bousculés par le temps (et l’informatique qui nous attribue deux fauteuils séparés). Les dossiers sont raides, lumières néons, ventilation. Le wagon se remplit d’inconnus qui nous ignorent ainsi que tous ceux qui ont déjà pris place. Assis sur les fauteuils mauves et violet striés, les uns derrière les autres, nous admirons le métal gris des tablettes repliées, la grisaille du plafond et le tapis qui lui répond par un motif moiré de vagues grises et bleues fabriquées par un logiciel. Gloups...

Un effet de larsen dans les hauts parleurs dissimulés tous les deux mètres vous pulvérise les tympans d’un discours hypocrite de bienvenue : « Au nom de la SNCF et de l’alliance Rail team… »
Vive l’Europe dans son élan de nivellement : les standards, les normes et la sécurité! Vos bagages sont obligatoirement étiquetés et vous devez aussi signaler tout bagage suspect.
Notre voisin, un jeune très élégant se fond parfaitement dans ce décor où rien ne dépasse, il sort tout droit d’une publicité genre dentifrice. Lui aussi nous ignore et poursuit ses conversations téléphoniques. Cela commence par la marge sur le Taittinger, puis il appelle le bureau pour obtenir le mail du client de Dubaï (et en passant, de celui du Sri Lanka). Sa montre doit coûter plus cher qu’un jeu de voiles neuves. C’est peut-être pour cette raison qu’il disparaît sans un mot à chaque fois que quelqu’un désire s’installer sur le siège voisin.

Les hauts parleurs : "Bienvenue à Saint Pierre des Corps, correspondance pour Tours." Les quais de correspondances sont indiqués sur des écrans en bout de plateforme. », la prise en charge ne s’arrête pas à la porte du train, on vous indique où poser les pieds et où regarder…
Des nouvelles têtes embarquent en nombre, une déferlante de genre humain à la démarche presque militaire avance dans l’étroit couloir qui conduit au numéro gagnant, celui qui correspond au billet. Chaque individu arborant son ticket et poussant son chargement de la jambe droite tendue. Notre nouveau voisin immédiat est un homme d’une cinquantaine d’années. Petit veston bleu marine à boutons dorés, chemise bleu ciel à manche courte sur pantalon beige et mocassins Sebago classiques. Le tout rehaussé d’une cravate reprenant évidemment les tonalités colorées de l’ensemble du jour (il y a même les touches de dorures).Ce type pue le cendrier, ses doigts sont jaunes orangés, ses cheveux gris en bataille trahissent un trop lointain coup de ciseau. Des poils lui sortent du nez et des oreilles. A chaque mouvement de bras je distingue de larges auréoles de transpiration acides dont le parfum ne m’évoque rien d’heureux. Sa toux est grasse, il baille et se gratte le crâne dégarni, ce qui a pour effet de répandre un tas de particules en suspension dans l’air.

Les portables, quoique formellement interdits sonnent sans cesse, Laurène se met aussi à tousser, un troisième vieux lui fait écho en rythme. Nous n’avons pas eu le moindre rhume en mer, cela risque fort de changer.On a de la chance, il n’y a pas trop de mômes qui hurlent, le calendrier nous laisse une semaine avant la rentrée des classes.

Le paysage défile à toute allure, des touches de nature verte et sauvage se fondent dans la campagne dorée de blés coupés du mois d’août. L’ensemble ponctué de "Promocash" et autres "Euro2000" sans oublier les enseignes génériques qui fleurissent partout aux abords des villes. Fini la mer, les rares rencontres qui apparaissent d’abord à l’horizon lointain. Retour aux châteaux d’eaux, aux poteaux électriques et aux clôtures. Chaque centimètre carré de terre est travaillé, bitumé, tagué. Nous fonçons à plus de 200 kilomètres à l’heure dans un cercueil vers Paris et personne ne semble inquiet.
Dans ce wagon de seconde classe, il est strictement interdit de fumer et de téléphoner, de votre fauteuil vous savez si les toilettes sont libres. Il y en a partout, il y a aussi des tables à langer, des zones réservées aux handicapés moteurs et d’autres réservées aux ordinateurs.

A cette vitesse, le ciel change en quelques seconde, on passe d’un soleil éclatant à une brume épaisse, on traverse la pluie comme un éclair.Nos pensées sont dehors, à travers les gouttes d’eau qui glissent sur la vitre telles des spermatozoïdes.

Aux toilettes, un mode d’emploi très complet commence par les interdictions (j’avais déjà été choqué sur les îles françaises des Antilles par un phénomène similaire qui concernait l’accès aux réserves, aux parcs, etc. La visite commence toujours par un panneau d’information reprenant un nombre impressionnant d’interdictions !).Interdit de jeter des objets, interdit de fumer, puis vient le petit sermon sur la propreté. La SNCF nous prend vraiment pour des cons, on vous illustre chaque étape du lavage de main au séchage. On vous indique où tirer la chasse, bientôt on vous dira où et quand chier !
En tout cas, pour 77 euros par personne (soit plus de mille balles à deux) on vous offre du papier de verre pas plus épais que du papier à rouler.

Le ciel est gris, le bétail s’agite, la fièvre monte et les haut-parleurs rappellent aux enfants de ne pas oublier leur cartable. Les deux minutes de retard déclenchent une avalanche de coups de fils illustrant la qualité du phénomène du « toujours joignable ». Nous assistons patiemment à une suite de phrases téléphonées qui pourraient illustrer le recueil du "t’es où?".

Paris, des flèches au sol aux masses humaines, impossible de s’écarter du chemin qui conduit à l’abattoir. C’est ainsi que nous vivons les premiers pas sur la lune…
On en a rêvé, dix fois, cent fois ! Mais l’arrivée au cœur de la gare Montparnasse est loin de répondre à nos attentes.

Le premier visage vers lequel nous nous tournons est celui du guichetier de la RATP. Un jeune homme excédé mâchant un chewing-gum en accéléré comme pour écraser le monde, fuyant du regard la moindre sympathie.Les portes d’accès aux quais ne sont rien d’autre que des guillotines latérales dont l’ouverture pneumatique automatique est programmée pour un passage d’une fraction de seconde.Cet accès nous conduit aux longs couloirs ponctués d’escalators où l’on se range pour mieux s’imprégner des publicités abrutissantes.
On a eu du mal avec le vacarme de notre bon vieux trois cylindres diesel mais au moins on pouvait l’arrêter ! Au secours ici rien ne s’arrête, les gens qui courent (on a vraiment l’impression qu’ils savent où ils vont !), la chaleur qui monte et ces odeurs en pagailles. De la pisse aux eaux de toilettes, chaque instant est un flash pour les sens. Cela vous brûle de la rétine aux tympans en passant par les poumons.

Pas un regard agréable et pourtant je le cherche comme une issue au maquillage, au déguisement de cette espèce cocottée méconnaissable. Heureusement, il y a des blancs, des noirs, des jaunes et des clochards fous pour traduire la différence. Vous devez rire, comment peut-on être surpris de l’absurdité après s’être fondu dix ans dans cette gigantesque fresque animée ?
En prenant du recul, en résiliant tous les contrats et en donnant ses clefs pour un temps.

Mais demain apparaît de nouveau, un an à vivre dans le présent dans le jardin du temps libre nous donne l’impression d’avoir des ailes. Demain, c’est un samedi, nous rassemblerons machinalement nos souvenirs matériels enfermés dans des cartons poussiéreux et remplirons nos placards de parures inutiles pour reprendre dans les règles le grand jeu de la vie.Nous ouvrirons grand les nombreux robinets pour goûter à l’eau propre et alignerons notre plus belle vaisselle pour consommer avec vous comme hier. Le lendemain, nous digèrerons la grande soupe et tenterons d’être nous-mêmes, même si nous sommes déboussolés.

La porte de notre maison est grande ouverte, la ville nous fait peur. Passez donc nous rendre visite à l’occasion, votre présence nous donnera certainement de bonnes raisons de revivre ici.


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lundi 16 août 2010

Transat, second round : Açores - La Rochelle











Nous quittons Angra do Heroismo le mercredi 28 juillet.
Le souvenir qui estampille cette douce escale au milieu de l’océan Atlantique est déjà installé confortablement dans le petit tiroir des précieux.
Il nous faut contourner Terceira pour trouver le vent établi, la mer est belle. Sur notre bâbord se découpe l’île de Graciosa, dernier repère terrestre avant La Rochelle (à quelques 12OO miles nautiques). Le soleil nous y fait un clin d’œil d’une rare beauté en choisissant ses reliefs pour virer au rouge puis laisser place à la palette immense des bleus qui épousent les couleurs chaudes si caractéristique des crépuscules.



Les premiers jours apparaissent comme un hymne à la lenteur, il nous faut créer notre propre vent à partir de la moindre brise. Des journées entières à tenter des expériences variant les combinaisons de voiles. Aussi, il y a les heures aliénantes de moteur quand le vent est nul !
Si certains marins naviguent en voilier comme on conduit une voiture, ce n’est pas notre cas…Nous n’avons pas le choix. Nous planifions toujours notre route en fonction des vents, en aucun cas selon nos envies. Cette fois encore, la route directe est rallongée de trois cent miles nautiques (pour écourter l’inévitable progression dans l’anticyclone, nous faisons cap plein Nord pour plusieurs jours).

Nous prenons presque goût à l’ennui quand l’océan devient un miroir. Dans le calme absolu, notre embarcation se transforme en observatoire et la mer en atlas.
Quand l’horizon ne nécessite pour l’œil aucune mise au point, que le bleu renvoie une lumière uniforme d’un mètre à l’infini, la vie des premières couches aquatiques devient un petit feuilleton.
Trois jours durant, nous observons un phénomène qui ressemble à une migration, un vrai défilé de baleines, dauphins, globicéphales. On voit même une tortue en promenade. Si nous avions une épuisette, nous aurions pu frire les petits poissons qui longent la coque par dizaines.
La nuit, quand le vent nous porte à une allure faisant suffisamment de remous, les dauphins nous font l’honneur de nous escorter. Au début, on se pose des questions.
Ce qui se passe est même très étonnant, en se déplaçant avec toute l’énergie qu’on lui connaît, le dauphin produit (grâce au plancton) l’effet d’une torpille fluorescente.
Au premier coup d’œil, on a un peu de mal à y croire, ces torpilles deux fois plus larges et longues qu’un dauphin qui se respecte, nous foncent droit dessus !
Le pire, c’est qu’une torpille arrive d’un côté, disparaît, puis ce sont deux puis trois et ça continue…

J’ai éveillé Laurène au début du spectacle, j’avais écarté l’hypothèse des dauphins (cela semblait énorme à cause de la traînée !). Je croyais que c’était des requins, des orques ou je ne sais quoi mais j’interprétais cela comme un genre d’attaque sous marine ! Il faut dire que deux requins nous rendaient une petite visite cette même journée (des petits, mais quand même !).

Le cinquième jour, le vent fraîchi, nous installons le foc de route et prenons un ris dans la grand voile mais cela ne dure malheureusement que quelques heures…Le 9ème jour le baromètre affiche 1022 hectopascals, cette fois nous vivons cela comme une victoire, enfin la porte de sortie de l’anticyclone.
Les oiseaux se font de plus en plus rares, c’est dommage ils nous tenaient en éveil en répétant des attaques sur notre ligne de pêche. Plusieurs amis ont connu de mauvaises expériences, un puffin (les fameux « cagaro », je pense que c’est leur nom en français, sinon ce sont les pétrels) voulant déguster le leurre à la traîne pris par l’hameçon…
Il faut donc être vigilant et remonter la ligne en cinquième vitesse lorsque l’oiseau la prend pour cible.
Il y a aussi des oiseaux noirs (plus petit) et puis, plus rare sous nos latitudes, les albatros. Ce petit monde vole jour et nuit, ils se reposent en groupes dans les zones de calmes.

Pour rien au monde, nous ne manquons le bulletin des prévisions météo diffusé par RFI, c’est un grand moment de la journée. Nous sommes maintenant capables de noter à la vitesse de l’éclair. Chaque matin à 11h30 TU, c’est la même cérémonie, cela commence par l’avis de coup de vent puis la situation générale qui localise les cœurs dépressionnaires et anticycloniques (la pression atmosphérique, l’évolution et la direction sont également mentionnés). Ensuite viennent les prévisions par zone pour 24h, qui nous fournissent des renseignements précieux comme force et direction du vent, visibilité, état de la mer.
Nous ne sommes évidemment pas assez rapides pour éviter une dépression qui se déplacerait à quinze nœuds dans notre direction mais cela nous permet de préparer le coup et de prendre des options d’une manière générale.
Ainsi, nous comprenons pourquoi nos moyennes sont si médiocres, une dorsale de l’anticyclone (à 1020 hectopascals, c’est moins puissant) s’étend jusqu’au golf de Gascogne.

La vie est belle à bord, outre les bons petits plats, Laurène prépare du pain (pour la deuxième fois depuis le départ).Quand il sort tout chaud de la cocotte, on le goûte simplement avec du beurre (un délice !).
Quelques heures d’un soleil haut suffisent à porter un bidon d’eau de 5 litres à une température tout à fait acceptable pour la douche. Encore un petit rituel, la douche dans le cockpit. L’eau de mer est fraîche sous ces latitudes, nous l’utilisons pour une partie de la toilette mais aussi pour la cuisson (les proportions sont variables), la vaisselle, etc. L’eau douce est réservée à faire mousser le savon et à se rincer.

A partir du 12ème degré de longitude Ouest, les cargos et autres monstres d’acier apparaissent en nombre en coupant généralement notre route (ils font cap Nord/Sud alors que jusqu’ici c’était Est/Ouest ou l’inverse). Nous redoublons de prudence lors des veilles, de jour comme de nuit (je ne dois pas rappeler que nous n’avons ni « mer-veille » ni radar).
Ce petit sursaut de trafic n‘est rien comparé à Gibraltar ! La seule chose détestable, ce sont les gros bateaux de pêche, très difficiles à identifier. Vu dans la nuit noire avec la houle qui vous fait disparaître la moitié des repères en rythme, on croirait voir des arbres de noël avec des lumières partout, et différentes selon l’action en cours. En plus il faut se méfier de l’erre des filets qu’ils traînent, et puis parfois ils chalutent en couple. Bref, l’horreur !
En voilier, on ne va pas où cela nous chante, la direction du vent soustrait un angle d’environ 90° et puis selon sa force on n’aime pas toujours empanner (sans entrer dans les détails ce petit souci avale lui aussi 90° de possibilités!). Vous l’avez compris, puisque la boussole nous refuse des quartiers, il faut donc observer des relèvements successifs nous indiquant la marche du navire et anticiper…
Nous en avons croisé de toutes les tailles, et de toutes les couleurs, on a vu une plateforme de forage pétrolière remorquée, une frégate faisant demi-tour juste devant nous, des portes-containers plus gros que ce qu’Haussmann a fait de plus grand…
Bref, pour en finir avec ces petits navires, saviez vous qu’un pétrolier par exemple peut mesurer plus de trois cent mètres de long. En gros, cela fait un tas de ferraille de 250 000 tonnes qui flotte lancé a plus de 15 nœuds!

Les jours passent, impossible de se détacher de l’envoûtant spectacle du ciel, est-ce là une notion du temps qui nous appartient ?
Pas un matin ne ressemble au précédent, de l’aurore toute particulière à la nuit noire étoilée, il y a un mouvement permanent qu’on ne se fatigue pas d’observer. C’est mon activité favorite, en pêche je suis nul.
Un poisson a mordu hier et je ne l’ai pas vu à temps… (nos lignes de traîne sont de simples lignes avec un émerillon qui se finissent par un bout de fil d’inox et d’un leurre, on n’a ni canne ni moulinet pour nous prévenir quand il y a du monde au bout, …on surveille).
Je deviens maître dans l’échec en pêche, les poissons gagnent toujours ! Celui d’hier, il devait faire facilement plusieurs repas, il a cassé un hameçon de 5 cm !
Pour les quelques bons poissons du début, surtout en méditerranée finalement, je pense qu’on peut mettre ça sur le dos de la chance du débutant. Depuis c’est une catastrophe, les daurades s’échappent, les leurres se font bouffer et maintenant les hameçons cassent.
Moralité, hors de question d’abandonner, on a encore un tas de citrons et de patates réservées pour accompagner la pêche…je n’ai pas dit mon dernier mot !

Tiens bientôt l’heure de manger, je plaisante on n’a plus d’horaire depuis longtemps !
Quinzième jour, au rayon fruits et légumes nous avons : une pomme et deux oignons. Le frais s’évapore…
En tout cas, nous n’avons jamais été si soigneux et respectueux envers nos amis les fruits.
Pour cette navigation, nous avions bien choisis nos fruits :du raisin, pêches, nectarines, pommes, poires, bananes, oranges. Certains un peu mûrs, la majorité complètement verts !
On s’est régalé, chaque jour apportait un peu plus de sucre et de jus dans nos fruits, on sortait les tomates chaque jour pour les faire rougir au soleil.
On les a choyés avec des petites boulettes de papier journal pour les protéger. On les a observés, touchés, sentis jusqu’à se qu’ils soient prêts…

Mercredi 11 Août, je pense à Etienne. C’est son anniversaire et une fois de plus je suis en mer, comme pour celui de tous mes frères cette année…

Jeudi. Je commence à faire les 400 pas. Non, ce serait compliqué. Alors je fais des 360° debout dans le cockpit, c’est vrai je suis tellement debout que j’en ai mal aux genoux ! Ca sent l’écurie ! Laurène est plutôt calme, la mer nous ballotte un peu depuis hier, on file bon train pour la Rochelle. Je m’amuse à imaginer la date d’arrivée depuis quelques jours et cette fois il faut considérer sérieusement la marée pour entrer avec le courant et suffisamment d’eau dans le chenal du vieux port.
Ah j’oubliais, on est dans le golfe de Gascogne ! Nous traversons actuellement la zone qui fait la réputation de ce golfe. Ici les fonds marins passent de plus de 4000 mètres à 200 mètres en quelques dizaines de miles, la mer est hachée, croisée, désorganisée (la houle nous traduit les fonds, on l’avait senti avant de consulter la carte). Dans les petites crêtes d’écumes les dauphins bondissent de toutes parts, c’est très touchant.


Vendredi 13 août, la nuit a été longue et fatigante, truffée de chalutiers…Goudrome est vif, nous surfons grand largue bâbord amure a plus de 6 nœuds de moyenne, la houle de Nord nous prend par l’arrière et veut nous sans cesse nous faire lofer. Le régulateur ne tient pas.
Quelques heures nous manquent pour programmer l’arrivée à la pleine mer ce soir… Rien ne sert de pousser au moteur, nous profitons d’une dernière nuit en mer pour un dernier repas aux chandelles étoilées.
Ce soir au menu, un beau thon pêché ce matin (dès le réveil j’ai envoyé la ligne, 10 minutes plus tard, je découpais des petites lamelles à déguster de suite avec du wasabi et de la sauce soja, un petit déjeuner de Samouraï) !

Il nous tarde de découvrir La Rochelle, de revoir Jean-René et vous tous !
Le problème c’est qu’on est juste trop tard pour la pleine mer du soir, le chenal d’accès est dragué à 50cm, on entrera donc demain, avec le courant et la marée (2 nœuds de courant avec nous et 6 mètres de hauteur d’eau de plus).
On se met à la cape au large pour patienter et on prend le courant dans le Pertuis d’Antioche à 4h du matin, entre l’île de Ré et l’île d’Oléron dont on découvre les nombreux phares.
Je n’ai pas dormi cette nuit, trop excité par ces quelques miles qui bouclent notre aventure sur l’eau…

Nous voilà à la Rochelle, accueillis dans le vieux port par un Jean-René survolté, et des amis rassurés, en plein milieu des festivités du 15 août. Ça fait beaucoup !

Désolés donc de ce retard, mais ça y est, nous y sommes !
On se laisse quelques jours pour débarquer avant de vous donner un sentiment sur ce qu’a pu nous apporter cette expérience.

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mercredi 28 juillet 2010

Dernier départ



Bonjour à tous,
Surtout ne croyez pas que c'est la fin, ce dernier départ (vers la Rochelle) est une nouvelle aventure.
Une petite quinzaine de jours de réflexion avant de restituer le bon Goudrome à Jean-René et retrouver la terre ferme, c'est comme un petit cadeau pour digérer tous ces souvenirs.

Cette fois nous partons le coeur léger, le soleil est radieux... De la garde-robe pour les trois jours à venir, nous ne sortirons que les sous vêtements (voiles légères) , il nous faudra passer l'anticyclone et monter au nord pour trouver du vent portant.

à bientôt
Xavier et Laurène

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mardi 27 juillet 2010

La tourada, corrida portugaise, ou l’art de la "festa brava"







De toutes les îles des Açores, Terceira est la seule à avoir conservé intacte la "festa brava" ou la culture du taureau. Les raisons de la naissance de la "tourada à corda" dans la rue et la tourada en arène sont l’abondance de bétail sauvage au cœur de l’île et certainement aussi les origines espagnoles qui furent jadis présentes. Autrefois réservées aux nobles et autres gentlemans de l’aristocratie dont Angra Do Heroismo fut le centre, c’est un spectacle bien démocratisé et très apprécié aujourd'hui.


Une des manifestations principales consiste à lâcher un taureau dans les rues, bien heureusement relié à une très longue corde que retiennent les picadors. Nous en avons vu dans différentes villes et avons pu observer que la bête charge un peu au hasard. Les hommes les plus braves virevoltent autour armés de parapluies, ceux qui se pensent bien planqués sur le toit d’une buvette peuvent être surpris par les bonds dont l’animal est capable, et enfin les touristes comme nous dont la sagesse n’attend pas un coup de cornes courent de manière désordonnée vers un buisson ou le muret d’une maison à proximité.

Il faut dire que depuis leur plus jeune âge, les Terceirense sont au contact de cet animal qu’ils considèrent comme le plus aimé. Ainsi nous avons vu des tous jeunes s’entrainer dans de petites arènes à courir devant des bovillons. Ces derniers, à l’opposé de leurs ainés, cherchaient plutôt à se planquer qu’à utiliser leurs cornes naissantes !

Baignés dans cette ambiance, nous n’allions tout de même pas rater la corrida qui se préparait ce samedi 23 juillet !

Avant de continuer, j’en entends certains penser "ouh, c’est pas bien la corrida", ce qui vaut bien quelques petites explications pour les non-avertis.

Tout d’abord, sur l'ensemble du Portugal (le continent et l’archipel des Açores), une corrida est appelée "tourada", et puis elle diffère de son homologue espagnol dans le sens où le taureau n’est pas mis à mort en public (enfin, ne soyons pas hypocrites, il finira tôt ou tard à l’abattoir, ou dans quelques heureux et rares cas, il finira sa vie au pré en tant que reproducteur).

Ensuite, et c’est bien ce qui m’intéresse ici, la majeure partie de la tourada se passe… à cheval ! C'est-à-dire que depuis un mois, j’ai monté quasiment tous les matins à Faial un cheval Lusitanien dont le dressage impeccable que je peaufinais était destiné à ces fameuses touradas… ainsi les piaffés et autres déplacements latéraux auxquels Arpão répondait révéleraient une part importante de la suite du programme à découvrir dans l’arène.

Cette arène (nommons-la, tant qu’à faire, s’appelle "Praça de Toiros") a été construite en 1984 pour promouvoir et protéger la culture du taureau, lorsque la vieillissante arène de São João a montré des signes de faiblesses.
Elle accueille ce soir quatre jeunes cavaleiros aux sourires ultra-brite : João Moura, Ribeiro Telles, Tiago Pamplona, et João Pamplona, qui rendent un hommage posthume au grand Raúl Pamplona.

Nous rejoignons nos places attitrées, munis de Sagrès et de bifana (tranche de viande de vache bouillie dans un petit pain). Nous observons que les gens sont habillés pour l’occasion, et nous sommes fiers d’avoir nous aussi revêtu une chemise blanche pour Xavier, et une robe pour moi.

Enfin, une porte s’ouvre et laisse fouler le sol parfaitement ratissé de l’arène aux différents intervenants du spectacle dans une hiérarchie qui présente d’abord les picadors, les forcados, les peões (toreros à pied), et enfin les cavaleiros (ces derniers sont acclamés et nous comprenons qu’ils sont de véritables stars ici). Certains tracent une petite croix dans le sable du bout du pied, pendant que les cavaleiros font volter majestueusement les chevaux en saluant les milliers de spectateurs.
Ça va commencer !

Un trompettiste annonce officiellement le début de la tourada, une pancarte tenue par un éleveur annonce la race, la provenance, l’âge et le poids du taureau… 475 kilos, tout de même !Un cavaleiro entre dans l’arène, ainsi que deux peões. Je dois dire qu’ils ont tous fière allure dans leurs habits brodés étincelants. La trompette se manifeste une seconde fois suivie de l’entrée en fanfare (c’est le cas de le dire) d’un taureau visiblement furieux qui se précipite vers ces cibles mouvantes. Le cavalier l’attire, le taureau le poursuit dans une course circulaire et on assiste à une sorte de danse effrénée. Le but de cette manœuvre est de planter les banderilles dans le point graisseux de l’encolure de l’animal. Pour ce faire, cavalier et cheval effectuent de grands exercices de haute-école : piaffés face au taureau, pirouettes au galop, épaules en dedans, cabrioles qui attirent des regards calculateurs du taureau qui prend quelques secondes de repos, pas espagnol, passage, et j’en passe…

Le cheval est par nature craintif et son instinct le pousserait à prendre la fuite devant un tel danger. Le dressage en fait un participant actif de la tourada et la longue tradition équestre portugaise prend ici tout son sens et sa beauté technique.

On sent clairement la jeunesse et la fougue du cavaleiro grisé par les acclamations, qui ne cesse d’éperonner son cheval et enchaîne les figures avec une rapidité incroyable. Pour apprécier, je pense qu’il faut regarder cet ensemble, savoir "oublier" les banderilles qui tâchent de sang le cou du taureau, considérer que la blessure des éperons sur les flancs du cheval est superficielle et se soigne très bien…

Puis les peões déplacent le taureau à la cape, attire son attention pour quelques passes, permettant au cavalier de sortir et aux forcados de prendre place ; Aucune mère au monde ne voudrait voir sa progéniture à pied, à mains nues, et coiffée d’un bonnet vert, se présenter ainsi devant une bête de cette taille passablement énervée ! C’est pourtant ce que ce jeune forcado s’apprête à faire, il l’invective avec arrogance, et le taureau se place face à lui. Un silence interminable s’installe, plus un bruit n’émane de l’arène.

Lorsque le taureau charge, le forcado le saisit par le cou, et s’accroche fermement entre ses cornes, c’est alors que les autres lui viennent en aide pour l’immobiliser. Dit comme cela, l’acte semble aisément réalisable, mais il faut voir avec quelle force le brave taureau agite la tête, projetant le dingue consentant qui a choisit de s’y accrocher, balayant ensuite dans sa course les 7 autres forcados comme des quilles ! Après s’être concertés, ils lâchent le taureau, et un désigné s’accroche à la queue pour faire diversion, se faisant trainer sur quelques mètres circulaires.

C’est là que les picadors rentrent en scène, amenant un petit troupeau de vaches que le taureau suivra (ou non) vers la sortie, avec ou sans les applaudissements selon le courage dont il a fait preuve. Ainsi le taureau qui a sauté en direction des gradins, détruisant au passage les parois en bois, a été très apprécié !

Cavaleiros, peões, et forcados reviennent à pieds dans l’arène pour recevoir leurs lots de félicitations, applaudissements et même quelques fleurs. Les beaux costumes immaculés des forcados sont tâchés, le visage du premier barbouillé de sang, une sandale gît au centre de l’arène, une sorte d’apaisement s’empare du public pendant que le sol est à nouveau ratissé pour accueillir le prochain taureau…

Que l’on soit partisan ou opposé, il faut reconnaitre qu’une tourada est une véritable démonstration d’adresse. La bravoure du taureau y est respectée autant que la grâce du cheval, l’habilité du cavaleiro, la musique présente aux moments cruciaux nous plonge dans un autre monde, et enfin il faut souligner le courage du jeune forcado qui s’élance sans arme contre une paire de cornes bien implantées dans la tête d’un animal furieux !

"O Toiro Bravo !"

Laurène

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lundi 26 juillet 2010

Angra do Heroismo / Praia da Vittoria (ilha Terceira)















L’île de Terceira est la cinquième et dernière île du groupe central. Elle porte ce nom car elle fût la troisième découverte par les portugais au XV ème siècle, c’est aussi la terre où nous accueillons Maëlle et Laurent pour une semaine.




La population est plus nombreuse sur Terceira, majoritairement concentrée dans deux agglomérations : Angra do Héroïsmo, la ville principale et Praïa da Vittoria, seconde ville située juste à côté de l’aéroport de Lajes.
C’est donc dans la petite Marina d’état de Praïa que nous attendons nos nouveaux invités. La ville est jolie mais quelque chose nous intrigue. Une fois de plus (c’est un phénomène étrange et récurrent aux Açores) pas un pavé ne dépasse, les bâtiments du XVII ème comme les dernières constructions contemporaines branchées nous épatent par les moyens déployés.
Ici, je pense que la base militaire américaine est pour beaucoup dans le développement démesuré des infrastructures.
Pour vous donner une idée, la nuit pour Goudrome dans une Marina des plus moderne et aux services illimités nous coûte 5 euros !
Le front de mer entier a fait l’objet de dépenses Pharaoniques, les bars et restaurants tout droit sorti de magazines d’architecture vous offrent des menus continentaux pour porte-monnaie américains ! Heureusement, les fuites de dollars sont concentrées dans la baie de Praïa, la vieille ville demeure ancienne et portugaise, les couleurs et la végétation hétéroclite y font chanter l’histoire.

En guise de soirée de bienvenue pour Maëlle et Laurent, nous partageons un plat local dans le petit cockpit de Goudrome. Quelques amis navigateurs se joignent à nous, dont Eric (un jeune français parti en solo de Norvège sur son GibSea 770 il y a six mois). Eric est chercheur en Océanographie, il travaille au quatre coins du monde sur la pêche industrielle.

Nous sommes donc cinq désormais, c’est parti pour la découverte de l’île.
Le premier jour commence tôt (et en tenue de sport s’il vous plaît) pour un petit footing sur la plage et un petit crawl histoire de se décrasser. Ensuite, à défaut d’avoir un vent suffisant pour déplacer Goudrome, en voiture direction la campagne !
Quelques centaines de mètres suffisent pour trouver ce paysage très particulier des Açores. Un temps un poil couvert et une température estivale idéale fabriquent une palette de verts au carrefour de la Suisse et de l’Irlande. Les parcelles de prairies sont tantôt séparées de grandes haies d’hortensias ou de murets de pierres posées. Notre carte qui représente l’île à une échelle qui ne dépasse pas la main distingue par un code couleur trois types de routes.
Les rouges (les « estradas principais ») ressemblent à des petites départementales parfaitement entretenues, les jaunes (« estradais secondárias ») sont moins larges et sont à l’image de nos chemins de campagne. Les blanches (« caminhos secundários ») sont des pistes qui commencent à réclamer du lourd en terme de véhicule.

Laurent est aux commande de la petite VW Polo dans laquelle nous tenons à cinq, je suis donc à la carte pour la navigation…
Tout commence au village d’Alguava, que nous contournons sans jamais retrouver une « route » digne de ce nom…
C’est donc sur un tronçon à pas moins de 30° et en travaux qu’une dame nous confirme que nous sommes en progression pour le « pico Alto ».
Les chemins que nous empruntons deviennent de plus en plus improbables (point de vue couleur sur la carte on doit passer du blanc au transparent), la majorité d’entre eux ne se font qu’en première vitesse avec de l’élan.
Nous sommes à la recherche d’une grotte, après quelques heures de montagne nous finissons par débusquer un autre interlocuteur qu’une vache. C’est d’ailleurs un vacher, perdu au bout d’un chemin sur lequel on aurait pu perdre la voiture deux fois (il a fallu descendre puis pousser le véhicule qui ne posait plus que sur trois roues pour s’en sortir). A notre grand étonnement le type sort d’un bâtiment devant lequel s’agglutinent les animaux, couvert de sang de la tête aux pieds. Il n’a pas l’air surpris et nous indique la direction en anglais !
Une journée entière de paysages merveilleux au cœur d’une immense réserve naturelle forestière ne nous fait pas regretter le détour : la rouge que nous trouvons finalement pour le retour aurait pu nous emmener au même point en 15 minutes !

La fameuse « Gruta do Algar do Carvão” illustre un phénomène volcanique étonnant, c’est un tunnel de lave de plusieurs centaine de mètres produit par une éruption (le même phénomène existe sur l’île de Pico, le tunnel dans ce cas mesure près de cinq kilomètres). A la surface, contrairement à tous les gigantesques cratères (« caldeira ») vus sur les Açores il ne reste que l’équivalent d’une cheminée de 70 mètres pour à peine vingt mètres de diamètre, tapissée d’une végétation luxuriante.
En bas, la visite s’achève sur un petit lagon d’eau potable mais aussi des étranges formations de silices qui s’agglutinent à raison de 10mm par siècle. Ce phénomène date d’environ deux mille ans.
Nous découvrons plus tard l’association des Montanheiros ( www.montanheiros.com ) au cœur de Angra, un musée aussi minuscule qu’excellent illustrant les phénomènes volcaniques aux Açores dans leur grande diversité. Ainsi, nous savons que Terceira a encore connu une éruption sous-marine entre 1998 et 2000 à douze kilomètres au large !

Le lendemain, nous reprenons les chemins de campagnes (je veux dire une bonne route rouge) à la recherche d’un « Parque de Merendas » (un genre d’aire de pique-nique).
Il y en a partout aux Açores, ce sont des espaces « aménagés », ni trop loin ni trop près des routes mais toujours au cœur d’endroits paradisiaques (près de la mer, d’une rivière et même dans la forêt). Ce qui est surprenant, c’est qu’on y trouve presque tout les attributs d’une cuisine : l’eau courante (et donc ce qui va de pair, un évier), des barbecues munis de grilles et même parfois de petit bois laissé par les précédents occupants, du mobilier (immobile dans ce cas, des tables et chaises en pierre ou en bois).
Bref, en débrouillant pas trop mal, on peut assez facilement accrocher des étoiles à sa table !
Les marchés et leurs superlatifs sont ici bondés de produits frais et de qualité, on a donc fait bonne pioche. Pour ne pas faire tâche on a même pensé au très respectable vin de pico.

Le spot idéal, nous le trouvons sur la côte Sud Ouest en contrebas du village de Santa Barbara (dans les hauteurs, le ciel n’est pas souvent dégagé). Des scouts y font un tas de jeux dans une arène en pierre ; évidemment, qui dit jeu dit taureau !
Un groupe de femmes entretient le feu dans plusieurs magnifiques fours à bois placés côte à côte sous des arcades en pierres de lave. Elles y cuisent différents pains et quelques préparations (quelques photos de notre grill sur madeincambuse.blogspot.com ).
A 18h, des détonations annoncent le début d’une « tourada », ce soir cela se passe à « Posto Santo ». Pour la petite histoire, le lâcher de taureau dans les rues est une tradition qui commence le 1er Mai et s’achève en Octobre. Des explosifs indiquent où cela se passe, un tir correspond au lâcher de taureau, deux tirs successifs indique le retour de la bête dans sa boîte.
Quatre beaux exemplaires bovins sont donc à tour de rôle libérés dans une ou plusieurs rues où tout est barricadé pour l’occasion. La première scène nous a beaucoup impressionnés !

Partout sur l’île, on trouve des images du genre bêtisier portugais, avec parfois des scènes d’une violence à vous glacer le sang …
Nous étions donc avertis, mais c’est en arrivant sur la piste pour en avoir le cœur net que nous découvrons quelques règles basiques :
La première qui nous échappe, ce sont les limites du terrain de jeu, matérialisée par deux bandes blanches au sol.
Nous passons d’un bon pas les derniers véhicules en stationnement, puis une buvette, et nous trouvons en marche vers ce qui semble bien être l’attraction. Les nombreux spectateurs sont agglutinés et avancent comme une vague a laquelle nous contribuons.
En un instant, ce qui se passe à quelques mètres après le virage nous (je veux dire les 5 touristes tout justes sortis de la Polo mais aussi les dizaines de spectateurs portugais qui suivent, eux, le mouvement depuis le début) apparaît en route parfaite de collision.
Là, nos yeux voient la bête comme nous croyons qu’elle nous voit, c'est-à-dire 7 fois plus grande ! Dans un moment comme celui là, on a beau être en bonne santé, on se trouve un petit disfonctionnement cardiaque…
Mieux vaut aussi porter un tee-shirt plutôt qu’un K-way tant l’adrénaline s’échappe par toute la surface de l’épiderme !
Nous rebroussons donc chemin en conservant le cliché plus que pornographique de l’écume chaude au bout de la silhouette noire en rut. Nos synapses établissent une connexion quasi instantanée, et nous nous étonnons maintenant de voir nos jambes mouliner à 2000 tours minutes sans même avoir eu le temps de choisir une direction. Là l’être humain se révèle dans ses limites ; plus de copains, plus de mots, plus de « pardon monsieur je voudrais aller par là », etc Ainsi, je me retourne le pouce dans le dos de la première silhouette sur ma trajectoire, Laurent bouscule aussi une ombre en mouvement sur son chemin. Bref, les quelques quintaux de gras à nos trousses illustrent un « sauve qui peut », qui aboutit dans un jardin à quelques 3 mètres plus bas pour les uns, ou selon l’humeur dans les buissons pour les autres !

Un deuxième élément important apparaît ensuite, une solide longe permet à une dizaine d’hommes de cadrer l’animal dans son élan.
Un premier groupe d’environ cinq personnes donne une aire au taureau et galope au fil de ses déplacements, un second groupe équivalent mais placé beaucoup plus loin sert de soupape de sécurité. Quoi qu’il en soit, dans la majorité des cas, ces hommes usent leurs semelles en se faisant traîner, quand ils ne sont pas directement la cible.
Nous découvrons la suite, la durée des sorties limitées dans le temps, les protections en laiton au bout des cornes,… d’un point de vue beaucoup plus confortable et dans une ambiance presque familiale.

Plus tard, au retour d’une promenade, nous découvrons un autre type de jeu. Le petit port de « Porto Judeu » est transformé en arène d’un soir. Le public est très vaste, placé en grappe des murs aux rochers en passant par les barques de pêches. Ici, le taureau libéré fini par tomber dans l’eau avant de rejoindre la plage pour la fin du combat…

Enfin, le vent semble suffisamment établi pour envisager un déplacement à la voile.
Deux possibilités sont envisagées, une navigation vers Graciosa (longue et au portant, 20h aller/retour) ou une petite sortie d’essai qui peut aboutir à Angra au Sud de l’île (vent dans le nez, on double la route en tirant des bords, prévoir 6h l’aller simple).
Ca souffle bien dans le port, Eric nous largue les amarres, les moussaillons sont sur le pont !
Grand soleil, 15 nœuds de vent établi, nous partons pour un long bord de près à 5 nœuds sur une mer peu agitée.
Je suis ravi d’être en mer et de voir Laurent à la barre qui résout les énigmes de causes à effets compas /barre/girouette. Premier virement de bord, Laurent passe la barre à Maëlle qui ne semble pas en joie à l’idée de changer de point de vue dans le cockpit.
A l’approche de la pointe des Contentas, Laurent est de retour au poste de barreur après un petit somme (perturbé par le petit bœuf aux carottes qui mijote pour le repas du soir), le vent fraîchi et la mer est un peu plus formée. Je décide de prendre un ris pour éviter trop de gîte ce qui pourrait accentuer le mal de mer qui semble régner à bord (Laurène qui n’est plus au top de sa forme a disparu, idem pour Maëlle), Laurent est donc réquisitionné pour choquer l’écoute de grand voile pendant que je réduis.
La manœuvre à peine achevée, Laurent rejoint le reste de l’équipage à l’horizontale.
Silence radio jusqu’à l’arrivée… (À l’exception de Laurène qui fit une brève apparition pour rendre à la mer les restes du poulet qu’elle s’était envoyé en affichant non sans fierté sa maîtrise des éléments).

Autant dire que le plat (spécialement concocté pour accompagner le délicieux St Julien reçu de nos convives) n’a plus aucun succès. Nous ancrons vers 22h dans la baie d’Angra, la houle rend le mouillage inconfortable. Laurent poursuit la diète jusqu’au lendemain, il reprend vie quand nous foulons de nouveau le ponton.

La ville d’Angra do Heroismo est un joyau d’architecture. Elle fût la capitale des Açores, aussi classée au patrimoine mondial de l’Unesco, c’est une cité de culture ou nous flânons sans but en remplissant pourtant nos paniers de lumières et de couleurs (Laurent et Maëlle sont équipés de bons appareils, leurs images sont particulièrement remarquables !). Des riches tentures au vent des portes d’églises aux larges points de vues panoramiques des quatre coins de la ville en passant par les jardins botaniques, tout prend une dimension poétique sous ce voile de ciel.

Até logo !
Xavier


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jeudi 22 juillet 2010

Angra do Heroismo / Praia da Vittoria (ilha Terceira)

Ne vous inquiétez pas, tout va bien. On ne comprend juste pas pourquoi ils lâchent des taureaux dans les villes. Jusqu'à aujourd'hui on a toujours été bien cachés.


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mercredi 14 juillet 2010

Les Açores encore... silence, on tourne !

















L’Anticyclone des Açores, c’est le symbole de la stabilité météo. Il a pour effet de repousser les dépressions. Pour illustrer ce phénomène simplement : sur une carte de situation météorologique, le vent est représenté par des flèches (indiquant sa direction et sa force) qui suivent des couloirs appelés courbes isobariques (représentation graphique obtenue par la mesure d’un ensemble de points où la pression atmosphérique est égale). L’anticyclone est au cœur du dessin, comme un ensemble fermé de haute pression à l’intérieur duquel il fait beau temps, parfois brumeux. Le vent y est donc faible, quasi nul et représenté par des petites bulles…
Est-ce cela qui nous retient ici ?


Non, notre atterrissage ne s’est pas fait par hasard sur Faïal, située au cœur de l’archipel des Açores. Quelques encablures seulement nous séparent des îles voisines : Pico, São Jorge et Terceira.
Et puis Horta, en étant le port le plus protégé naturellement, génère des passages en tout genre. C’est ainsi depuis le début du siècle. Après la seconde guerre mondiale, des navires de toutes tailles mais aussi les premiers hydravions transatlantiques remplissaient la baie.

Un soir, alors que nous prenons un verre avec quelques amis sur la baie de Porto Pim (l’endroit le plus romantique à cinq minutes du port, une magnifique terrasse en hauteur entre l’océan et le flanc du Monte Guia), un couple d’un certain âge retient mon attention, assis côte à côte, ils sont simplement beaux. Habillés pour l’occasion, ils semblent au comble de la satisfaction. Je ne peux m’empêcher de les saluer, puis même de les interroger. J’apprends ainsi que la source du petit bonheur suspendu au fond de leurs yeux, c’est Horta.
Cette ville, ils la découvrent par l’océan à l’époque où Laurène découvre le monde, soit 27 ans plus tôt. Pour être précis, en 1983, ils entreprennent un voyage qui ressemble de très près à celui que nous achevons. Ils quittent la France pour les Antilles en participant à la croisière des alizés, c’est en 1985 qu’ils arrivent aux Açores en provenance de Point à Pitre.
La superposition et le décalage d’un quart de siècle nous touche, le témoignage de Claude et Magdeleine nous livre une ville restée intacte. Ils imaginaient une côte bâtie, défigurée par les hôtels de luxe en béton mais le joyau est resté fidèle à leur mémoire.

Les ports ont été, au fil de notre voyage des greniers à rencontres (et à histoires en tout genre), mais celui-ci tout particulièrement. Les océans se pratiquent à certaines saisons, dans un certain sens. Ce n’est pas un hasard si les gens se croisent et partagent des expériences pourtant très différentes au bout du même chemin. Ici, nous sommes au carrefour de plusieurs routes.
Si la majorité des navigateurs arrivent de tout points de l’Amérique, d’autres visent les Açores depuis l’Afrique et même l’Europe.
Dans chaque cas, la mer est vécue différemment, les expériences sont riches d’enseignements !
Cette année quelques bateaux ne sont pas arrivés à bon port… notamment aux Açores. Voici quelques anecdotes de naufrages qui finissent bien, il semblerait que quatre bateaux qui nous précédaient ne soient pas arrivés: le premier a coulé à cause d’un incendie déclaré sur un des moteurs (il s’agit d’un catamaran), le skipper ignorait qu’un orifice spécial était prévu pour l’utilisation de l’extincteur. En ouvrant le coffre moteur, il crée une explosion qui signe la perte de son navire… le second subi une puissante vague qui provoque la déchirure de la jupe arrière (rapportée) ! L’événement génère une voie d’eau importante que le capitaine ne peut surmonter seul. Il finit par percuter le radeau de survie (après avoir communiqué ses intentions par radio) dans lequel il s’installe, mais il ne supporte pas longtemps sa condition (ces canots sont couverts d’une toile, un peu comme une tente de camping). Il quitte donc le bateau, puis perd le radeau pour finir sans rien dans son annexe !
La dernière histoire concerne un voilier qui a touché un objet, peut être une baleine ?
Même situation que le précédent, un solitaire qui doit faire face à une voie d’eau importante mais cette fois, le problème génère une autre panne d’ordre électrique (plus de pompe de cale car plus de batteries).
En communication avec un autre voilier, l’homme se bat pour évacuer l’eau pendant de longues heures, le voilier au courant de l’avarie reste assez proche et décide d’envoyer sa propre annexe à l’eau avec à bord un petit groupe électrogène… L’annexe et le groupe n’arriveront jamais jusqu’au navire en détresse, l’homme à bord est finalement contraint d’abandonner le navire. Il sauve un sac contenant les indispensables papiers jusqu’à son sauvetage où il l’égare.

Il y a aussi les récits des gens que l’on rencontre directement, comme François sur Pitufo, un voilier en acier qui est une histoire à part entière.
François a imaginé, dessiné et fabriqué son rêve comme son bateau, c’est un homme barbu d’une soixantaine d’années qui a toujours une pipe ou un sourire aux lèvres. Comme beaucoup de navigateurs solitaires, c’est en quelque sorte un moteur diesel…impossible à arrêter quand il est parti !Après avoir suivi un amour de jeunesse jusqu’en Allemagne, il y exerce la profession de kiné pendant plus de vingt ans, il quitte ensuite la terre et donne libre court à son envie…le large.

Cet homme, avec qui nous avons dîné à plusieurs reprises, apparaît comme un sage. Il se distingue par la réserve et le calme avant de se révéler comme un livre complexe. Il s’exprime en quatre langues sans manière mais maîtrise, chaque sujet abordé libère une connaissance incroyable, notamment en mécanique. Après avoir exercé ses dons sur le squelette, il s’attaque au moteur avec la même passion. Son bateau est actuellement propulsé par un moteur à essence de Fiat 126 acheté en panne pour cent euros. Pour varier le plaisir, il a commencé un engin (un ULM) chez son ex au Sud du Portugal, il sera propulsé dans les airs par un moteur de 2CV sur lequel il bricole une double carburation…

Là où le grain de sable perturbe la mécanique, c’est précisément dans le sablier…
Le temps semble avoir un effet récurrent chez ces navigateurs de talents, on pourrait parler (sans pour autant que cela soit péjoratif) de clochards des mers, les pros de la récupération qui font des merveilles avec de l’air et des idées.
Au bout de vingt-cinq ans, le problème devient une histoire d’objectivité. Quel regard Guy (un autre solitaire qui retape des machines à coudre dans la baie de Saint-Georges à Grenade) porte-t-il sur sa maison-épave en acier encalminée, enracinée. L’homme qui réalise ses rêves perd-il la notion de flottabilité, de sécurité ; où est la limite ?

En prenant la mer, François court un risque…
Son bateau ressemble à…
Non, pour commencer une description fidèle je dois avouer que Pitufo ne ressemble à rien ! François l’a jugé trop petit en cours de carrière (il mesurait 8,50m) et à choisi de le couper en deux pour lui ajouter deux mètres ! Cette opération doit dater, elle est presque invisible…
Ce qui saute aux yeux, c’est le mat rallongé, les haubans et autres câbles qui sont mis bout à bout, les tubes d’acier cassés qui remplacent les filières inexistantes, etc.
Observer Pitufo, c’est se perdre !
A présent, le petit couple (François et son bateau) est à sec au bout du port, Vladimir (notre feu voisin du ponton B) a ressoudé une tôle de deux mètres de long sur l’avant !
François a passé, lui aussi, sa traversée depuis St Martin à écoper des centaines de litres quotidiennement. A trois reprises, il a plongé (accroché à un bout) pour colmater au mieux les voies d’eaux créées par un choc dont il ne connaît pas l’origine.
Il fait partie de ceux qui bougent encore, je lui souhaite de ne jamais s’arrêter. Finalement, il a l’air heureux !



Pour revenir à nos aventures personnelles, Dieu merci nous sommes toujours en mouvement !
Après avoir sillonné les réserves naturelles et les campagnes en multipliant rencontres par découvertes, nous suivons volontiers l’équipage de Flamboyant (les 4 F, Fred, Florence, François) qui nous invite à tester la couchette arrière du Sun Kiss 47. Nous les retrouvons au mouillage de Madalena à Pico (la houle rentre et rend le mouillage infect, mais grâce à l’expérience d’un pêcheur qui nous apprend à installer des poids sur les amarres, nous passons une bonne nuit à quai). Le Pico, majestueux cône volcanique, est le plus haut sommet portugais (2351 mètres) et la caractéristique principale de cette île «noire».

Enfin presque, ce qui nous conduit au cœur de ce décor fabuleux, classé patrimoine mondial de l’humanité, c’est plutôt la particularité de la vigne. Le labeur des hommes est omniprésent, des milliers de kilomètres linéaires de pierres volcaniques rangées, empilées impeccablement pour former des petites parcelles souvent cultivées à la main et à la mule (la terre est rare sur Pico, les cultivateurs l’importent de Faïal, en retour les maçons de Faïal importent les pierres). La vigne est lumière sur fond noir, nous parcourons les étroits chemins de lave pour atteindre le domaine «insula» où nous trouvons des hommes en plein travail. L’un d’entre eux, le propriétaire, nous emmène pour une dégustation «au cul du tonneau». Comme le vin (le verdelho) le type est charmant mais semble clairement plus intéressé par ses pieds de vignes que par les casses pieds que nous sommes.
Nous repartons quand même chargés de quelques litres (17 litres à peine, cela devrait suffire pour les copains !) de précieux sang de lave, sans flacon ni étiquette.

Le calendrier des fêtes est plein à craquer pour divertir les îliens, tout particulièrement pour la période estivale. Ce soir nous sommes conviés à une fête religieuse juste devant la chapelle du petit port de pêche du bout de la ville. Rui qui nous y invite a vingt ans, il est fier de son île et de ses traditions, un de ses amis est pour l’occasion en costume de cérémonie sur scène au cœur de l’orchestre philarmonique (il y en a treize sur l’île). L’atmosphère sort tout droit d’un album-photo souvenirs aux pages glacées, où les photographies ont les couleurs des ducasses de village d’il y a trente ans. On y mange sous une tente des «lulas», et des gros haricots rouges comme le nez du voisin, etc.
Les générations y sont toutes parfaitement représentées : les petites filles en robe de soirée dansent en se moquant cruellement de la petite grosse, les garçons jouent au football avec une bouteille en plastique remplie de sable et se fichent du reste du monde.
Les parents ont trouvé un bout de comptoir pour y retrouver leurs amis et les vieux s’endorment dans les fauteuils en plastiques au troisième rang.

Pico est aussi l’occasion pour Laurène de reprendre le volant… de me conduire jusqu’à 1300 mètres, jusqu’aux nuages ! En passant, j’ai vécu des heures de stress aussi intenses que mémorables en passager, donc du côté des précipices ! Je pense qu’il est important de préciser que le métier de moniteur d’auto école est un métier difficile. Laurène affiche 50 heures de conduites à tout casser ; avant le virage dans lequel on trouve un troupeau de vache au beau milieu de la route… Le véhicule est parfaitement maîtrisé pour l’arrêt, la difficulté c’est plutôt le démarrage (sous les yeux du type qui fait de son mieux pour rassembler les bêtes) en côte dans les cailloux et le troupeau. Plus tard, Laurène nous fait un petit virage rapide digne d’un rallye de montagne ou d’un jeu vidéo! La raison : « tu me demande de tourner mais il y a une voiture qui nous suit ! ».

Et puis arrive le grand jour, le jour où des amis vous rendent visite. On y croyait plus vraiment au bout de dix mois !
C’est Julien qui séduit une copine, monte un projet, fait acheter deux billets et boucle sa valise en 48h. Bravo !
Son courrier explicatif est aussi culotté que drôle, je me dois de le partager :

Julien : (extrait de l'improbable mail envoyé de Lisbonne à son ami, pour qui il/nous tournons le clip)
« Il y a du nouveau pour le clip. Alors que j’étais place des fleurs à déposer un cv au petit kiosque, je parlais du tournage avec Héloise sur un banc, et Xavier m’appelle !
Xavier est mon ami de Saint Ouen qui vit avec Laurène dans la première maison, c’est le belge qui a l’atelier où Gian Carlo et Ricardo se trouvent.
Il a fait le tour de l’Atlantique sur un bateau avec Laurène son amie.
Il y a un blog qui raconte leur journal de bord et cette histoire va sans doute devenir un livre. Des publications d’articles dans un magazine de voile sont prévues.
Ils sont actuellement aux Açores, les îles portugaises au large, portes de l’Europe quand on vient de l’Amérique.
Mes parents ont construit des voiliers et j’ai passé tout les étés, parfois des hivers de mon enfance et adolescence sur un voilier. Sur la mer l’océan et parfois même des fleuves et des canaux.
C’est une formation très forte que de vivre sur une coque avec sa famille. C’est parfois très dur surtout pour l’enfant un peu autiste que j’étais.
Il y a des choses que je n’ai pas comprises et que je n’ai pas aimées. Je me dis qu’il faut que j’y retourne.
Je ne suis jamais vraiment remonté sur un voilier et naviguer depuis cette adolescence.
Filmer Héloïse qui me trouble le cœur, avec Xavier et Laurène et surtout la mer, la plénitude, l’océan, la lumière et l’horizon.
L’intimité de la coque, d’un cockpit, comme dans une coquille de noix et l’immensité du grand tout bleu et lumineux sur les bords.
Tu me proposais de me prêter de l’argent pour ma santé mentale.
Je vais faire de l’art thérapie : Je vais tourner ton film sur le bateau : un groupe de 4 personnes : 2 femmes, 2 hommes (barbus J):
Xavier a une formation en cinéma avant de devenir ébéniste, scénographe et constructeur, Laurène est graphiste et directeur artistique, étude de tendance, elle a une forte intelligence et s’émerveille sans cesse du monde animal. Héloïse, qui étudie l’histoire de l’art et a une bonne culture cinématographique de par sa famille et qui s’émerveille presque de tout, m’accompagnerait.
Il nous faudrait juste prendre un avion et Xavier et Laurène nous nourriraient sur place.
Le prix des billets d’avion pour Héloïse et moi s’élève il y a des vol pour 2 compris entre 198 ou 250 euros soit environs 400 euros.
C’est la somme que je souhaite t’emprunter pour ma thérapie, si c'est possible.
C’est aussi la somme régie du tournage sur l’horizon.
Ce tournage, (les rush super 8), je compte l’exposer dans les installations d’Olivier Perriquet (des installations de projecteur vidéo argentique) lors d’exposition et il pourra servir aussi au livre de Xavier et Laurène.
Nous utiliseront ces rushs pour monter le vidéo clip du titre « on the verge » de Loki Starfish.
Il faudrait qu’on parte pour le samedi 3 juillet.
Dis-moi ce qui est possible ?
Bien à toi,
Julien »


Et ils atterrissent effectivement le jour prévu, pour une courte semaine de travail/vacances(le programme est lourd, dix bandes de trois minutes à tourner !).
Julien n’a pas changé, Héloïse est charmante !
L’axe des prises de vue n’est autre que l’horizon, nous passons donc du temps sur l’eau, (à la voile ou au moteur, et oui c’est la nature qui a le dernier mot quand on est pressé) entre Horta et Velas sur São Jorge puis Pico où nous retrouvons Rui par hasard pour une nouvelle soirée de folklore.
Rui chante dans un groupe traditionnel de Pico, nous dansons et buvons des Aguardiente jusqu’à ce que nous puissions rejoindre dignement Goudrome en annexe…
A travers cette courte visite, nous redécouvrons l’idée de programme, la vitesse, les impératifs avec toute la mauvaise foi dont on peut se prémunir pour croire que nous-mêmes n’en avions jamais été victimes. Quand Julien reçoit un coup de fil sur son portable, nous sommes presque choqués.
Ce séjour laissera des traces indélébiles de fado, de chants de «Cagarro», d’hortensias, de vertes prairies, de piscines naturelles, et de quelques gueules de bois…
Le départ d’Héloïse et Julien nous laisse aussi face à notre propre départ, incontournable !


Heureusement, pas plus tard que le lendemain, nos amis d’Epicure arrivent avec leur lot d’histoires en provenance de Flores qu’ils ont adoré. En plus du yaourt, Damien s’est mis à la fabrication de fromage !
Nous passons de bons moments mais cette fois nous avons une date à respecter, nous accueillons d’autres amis, à Terceira cette fois.
Les préparatifs de départ se font sans stress, je m’autorise même une petite sortie avec Vladimir histoire de tester un Bavaria 36. Quelle surprise une fois à bord, Vladimir n’a jamais manœuvré seul et a très peu d’expérience. Je le découvre très vite, il ne prête pas attention au vent, envoie toute la grand voile par presque 20 nœuds sans la regarder (elle est déchirée, nous prenons deux ris pour la réparer en collant un adhésif sur les deux faces !). Au moment d’envoyer le génois, idem sous la capote qu’il n’a pas voulu replier, il sort le génois au winch !! Et sans choquer la bosse d’enrouleur…
Résultat, je l’arrête dans son élan victorieux sans trop croire à ce qui arrive, le système d’enrouleur est déjà cassé…mais réparable.
La voisine anglaise, Carolina, embarquée aussi pour l’occasion surprise ne sait pas plus où se mettre, Vladimir se fait maintenant prendre en photo par le quatrième embarqué (un de ses potes de San Miguel qui voudrait prendre des cours de voile) à la barre, cheveux dans le vent et une bière à la main.

Adieu Horta, on avait oublié le sentiment ressenti la veille d’un réveil non naturel. A 5h du matin nous sortons lentement du port qui dort…
Nous sommes silencieux et émus, pas un mot ne se présente à la porte, nos regards se croisent et nos cœurs sont serrés (les pensées de Laurène sont certainement encore au centre hippique).
Une légère brise nous emmène tranquillement à Graciosa où nous trouvons un mouillage paradisiaque. Le lendemain à l’aube nous poursuivons la route par un bon souffle de Nord Ouest vers Praia da Vitoria en longeant Terceira par le Nord.


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