vendredi 25 juin 2010

La transat version équipage

Après le récit de transat par le capitaine, voici le récit tel qu’il apparaît dans le carnet de voyage de l’équipage. C’est plus concis, reporté de manière quotidienne dans les conditions de notre habitacle en marche mais il nous a tellement faire rire hier soir que nous y avons rien ajouté et j’ai finalement accepté de le partager tel quel.
Un jour, lorsque mon précieux mac sera de nouveau opérationnel, je pourrai y ajouter quelques illustrations du même carnet.


Samedi 15 mai / Jour -1
Nous quittons la marina de bas de Fort à Pointe-à-Pitre pour aller dormir une dernière bonne nuit à Marie-Galante.

Dimanche 16 mai / Jour 1
Départ de Marie-Galante, une connerie. Nous tirons des bords toute la nuit dans des grains. Stress et énervement à bord. Beaucoup de vomis.

Lundi 17 mai / Jour 2
Traditionnelle crise d’hystérie et tétanie quand il faut recoudre la voile au près et sans l’affaler. Menace de retour à Saint Martin. Encore du vomi.

Mercredi 18 mai / Jour 3
Ça bouge ! Toujours au près. Je commence à manger un peu de crudités (carottes, concombre, tomates, melon) Dans quelques jours je dirais : « j’ai fait la transat retour ». Point. Ça ne sera qu’un événement de quelques mots dans ma vie. Mais pour le moment j’en fais tout un plat.
Meilleure position : allongée sous le ventilo.
Meilleur moment : ceux où je rêve en dormant, rinçage à l’eau douce sous la pluie.
Pire moment : la nuit. Rentrer faire le point puis vomir.
Meilleur repas : les compotes, le melon.

Jeudi 19 mai / jour 4
Mon problème avec la houle.
Si le bateau se contentait d’être le bateau, le vent d’être le vent, alors je n’aurais aucun soucis en nav. Non, ce qui fout la merde au tableau c’est la houle. Un bateau qui file sur une mer plate c’est idéal et ce n’est (presque) JAMAIS le cas.
PS : vomi mes crudités cette nuit.

Mercredi 20 mai / jour 5
Renaud dit : « j’ai vomi mon 4H et mon minuit aussi, je me suis cogné partout, j’ai dormi dans des draps mouillés, ça m’a coûté des sous, c’est d’ la plaisance c’est le pied ». J’écoute beaucoup Renaud en ce moment. J’aime bien. Il me fait rire. C’est un poète à sa manière.

Nous avançons à 120 milles par jour. Cela veut dire qu’il reste encore... 15… 16 jours ? Si nous ne rencontrons pas d’embûches. (Dieu, que ça tangue, c’est infernal)

Vendredi 21 mai 2010 / Jour 6
Le temps me semble long. Ça tangue toujours à bord, je me déplace peu mais je lis et regarde des films. Je n’ai toujours pas d’appétit. La nourriture me dégoûte un peu car j’ai constamment peur de vomir. Si je mange, cela se vérifie malheureusement. Ce petit régime imposé n’est pas plus mal.

Un oiseau marron et blanc nous suit depuis quelques jours. Il vient se poser dans le sillage de Goudrome, met sa tête sous l’eau, puis repart en s’approchant de plus en plus près. Il est de moins en moins farouche. Nous l’encourageons en poussant des petits cris «kiou kiou» comme on a vu Moitessier le faire dans la vidéo de la «Longue route».

Je lis un livre bien : « Bel espoir, voyages avec les drogués », des voyages effectués en 72, 73, et 74 avec le Père Jaouen. Je suis molle, je me laisse vivre. Décidément, je n’aime pas les longues navigations, elles me dépriment un peu.

PS : Je salive devant les fiches recettes de Elle. Particulièrement le navarin d’agneau avec les petits pois frais. Le lapin à la moutarde aussi. Les crèmes catalanes. Les rougets au jambon de Bayonne. J’ai hâte d’arriver aux Açores pour goûter à la gastronomie Portuguaise. Il reste1800 miles environ (poisse, c’est long).

Samedi 22 mai / jour 7
J’ai vomi ma compote. Ça secoue toujours et ce n’est pas agréable. Ce matin j’ai «pété les plombs» en constatant que l’eau s’infiltrait dans mon placard à habits, foutant en l’air au passage quelques vêtements. Tout est trempé, pue déjà, et certains sont tâchés de rouille (les blancs évidemment). Je m’emporte, crie, pleure, ce bateau je ne le supporte plus, au lieu de m’épanouir, il m’affadit de jours en jours, me transforme en loque… Je n’aurais jamais du céder à l'insistance de Xavier... Bref, tout cela permet de nous expliquer, d’en parler calmement. De remettre nos attentes sur la table, et de ne pas en vouloir à l’autre de ce qu’il ne peut pas faire. Du coup ça va mieux.

On lance des appels VHF sur le canal 16, cela donne : « appel à tous les bateaux, ici Goudrome petit voilier de 10m, nous traversons l’Atlantique, quelqu’un nous entend ?" Evidemment, nous ne recevons pas de réponses, mais il serait bon de pouvoir parler à quelqu’un d’autre. C’est rageant parce que si ça trouve un bateau se trouve juste à un mille de notre portée et il n’entend rien.

PS : Xa joint un cargo dans la nuit, il nous dit « good luck and take care ».

Lu : Le diable par la queue, Paul Auster (bien) et L’écume des Jours, Boris Vian (pas aimé)

Dimanche 23 mai / jour 8
Xavier et moi imaginons que nous vivons dans un théâtre. Des gens sont payés pour secouer le bateau et balancer des seaux de flotte régulièrement.

Ce matin, alors que nous dormions un peu tous les deux, j’ai entendu un énorme crac (une vague venue s’éclater sur la coque, encore). Et lorsque j’ai ouvert les yeux, c’est un Xavier à la verticale, les yeux exorbités, suivi de son matelas et oreiller qui m’est apparu : il a volé de la couchette jusqu’à la table ! Un bidon d’eau est tout droit sorti du placard en dessous pour se répandre dans le carré, un jerrican de gasoil en fait de même, se déversant au passage dans les chaussures de Xa. L’eau s’infiltre dans l’aération de la cabine avant, le moral est un peu bas ce matin.

Le bateau est sans dessous-dessus. Cela Fait 7 jours sans discontinuer (nous hésitons à nous arrêter aux Bermudes) mais cela ne peut pas durer éternellement, ça finira par se calmer. J’ai peur de m’arrêter aux Bermudes et de ne plus vouloir revenir dans le bateau. Sans rire.

Sur RFI, la présentatrice décrit un temps magnifique à Paris et espère qu’il e est de même en mer. A la fin du bulletin, elle s’excuse parce que les conditions en mer ne sont pas terribles (c’est le WE de pentecôte, réunion familiale, j’aimerais y être).

Mardi 25 mai 2010 / Jour 10
Le temps est calme. La mer douce. Le ciel gris. Le moral revient peu à peu. Je mange. Je lis «La première gorgée de bière » de Phillipe Delerm. J’aimerais faire tant de choses en rentrant à Paris

  • Boire un thé au lait au coin du feu enroulée dans une couverture à Saint-Ouen
  • Monter à cheval accompagné de Jewel le dimanche après midi
  • Flâner dans les rues de Paris (seule ou avec une copine)
  • Cuisiner dans la grande cuisine
  • Me lover dans un bain chaud
  • Pédaler autour du jardin des Batignolles
  • Acheter un nouveau vélo pour mes escapades à Gambais (un genre de vieux VTT)
  • Conduire et vagabonder sur les routes de France, à plus faible distance en forêt de Rambouillet souvent, placer Xavier dans cette même voiture et l’emmener au hasard.
  • Marcher dans la boue en Bourgogne. Y boire du vin dans une maison en pierre.
  • Emmener Maman en virée en Belgique, place du jeu de paume à Bruxelles, toutes les deux
  • Aller camper en montagne avec Papa. Juste entre père et fille.
  • Rendre visite à Emeric au Danemark, avec Brice. Juste entre frères et sœur
  • Regarder pousser les petits pois.
  • Aller au marché le dimanche matin et faire un détour pour aller chercher la baguette chez le boulanger primé « meilleure baguette de l’année en cours ». Un snobisme délicieux.
  • Rentrer le soir un peu fatiguée sur ma bicyclette, m’arrêter dans un petit bar, y attendre Xavier, Seb, Caro, Will, Julien, Carmen, Julia… et qui voudra
  • Dans une autre version : rentrer le soir un peu fatiguée sur ma bicyclette et retrouver Xavier dans un petit restaurant… Un Eddy’s Burger au Manoir, un restaurant japonais, une pizza italienne… peu importe pourvu que ce soit à Paris.
  • Ecouter Fip en prenant le petit déjeuner, surtout n’écouter les infos que d’une oreille.
  • Parcourir une nouvelle épicerie japonaise, démasquer les saveurs de la cuisine nippone, pour les recréer dans ma propre cuisine.
  • «Allez tiens, elle me va bien cette robe, ça sera joli avec mes bottes» et emporter l’objet du délit hors de la cabine d’essayage pour la porter le soir même
  • Trouver des nouvelles graines chez Leroy Merlin, ah puis un nouveau pot… et puis du terreau… et de l’engrais… et de...et de…
  • Etaler des draps propres dans le lit, les respirer et attendre Xavier.
  • Faire un hachis parmentier, au FOUR ! Tout ce qui se gratine est délicieux.



Lu : Greffier, Joan Sfar (très bien) et Trieste Bologne, David B (bien)

Mercredi 26 mai / Jour 11
Entre hier et aujourd’hui nous n’avons fait que 50 miles ! Une merde ! La veille on en avait fait 152 !

La nuit a été très calme, plus du tout de vent, la grand voile affalée, nous nous faisons bercer par les flots apaisés. Inutile de préciser que je suis très en forme.
Je fantasme le retour à Paris et surtout l’arrivée aux Açores et toutes les nouvelles merveilles. Xavier regarde la trilogie du Seigneur des Anneaux, version longue, il confond tous les personnages mais il aime bien.

Nous parlons beaucoup, varions les sujets de conversations. Enfin, on essaye.
Phrase du jour : «C’est super, on est de travers, Laurène!

Oui, c’est vrai, j’occupe aussi mes journée à découper des recettes de cuisine dans des magasines… Dieu du ciel, ce carnet de voyage est composé de 90% de bouffe!
(Recettes découpées avec photos à l’appui : Méli Mélo de printemps et veau Gremolata, fraises compotées et perles coco-vanille, terrine de raie et poireaux nouveaux, carré de veau aux morilles et grosses frites de polenta, terrine de lapin aux pistaches, noisettes et pignons, saltimbocca de veau).

Lu : La gloire de mon père, et le temps des secrets, Marcel Pagnol (très bien)

Jeudi 27 mai / jour 12
Aaaaah la belle journée ! En vent arrière, un bon décrassage shampooing compris. Xavier sort les matelas mouillés, le linge sèche au soleil, et je cuisine à midi des œufs pochés au vinaigre sur lit d’épinards et champignons à la sauce St Chinian. Présentés avec des petits toasts en triangle, c’est une merveille (avec des conserves bien sûr, mais doit être encore meilleur avec des produits frais).

Lu : Nos amis les humains, Bernard Weber (pas aimé) et La bible au féminin, Sarah, de Marek Halter (pas mal)

Samedi 29 mai / jour 14
Journée très calme, au portant, similaire à il y a deux jours. La veille il faisait gris et froid et là c’est un grand soleil qui éclaire nos pensées. Nous en profitons pour faire cuire les confits de canard accompagnés de pommes de terre sautées avec de l’ail. Pas une engueulade au tableau, nous sommes en harmonie.

Franck de la Loupiote avait raison, il nous fallait le retour pour «digérer» tout ce que nous avons vu et rencontré durant le périple.

Lu : Loup, Nicolas Vannier (ouais) et Où on va papa ? Jean-Louis Fournier (très très bien)

Mardi 30 mai / jour 15
Nous apercevons une grosse baleine et des genres de méduses blanches et roses, à aileron, qui se déplacent avec le vent. On dirait des raviolis japonais. En un peu plus gros.


Lu : Nouveaux contes de la folie ordinaire, Charles Bukowski (sans commentaire); Saga, Tonino Benaquista (bien); Le pourquoi du comment, Daniel Lacotte (par intermittence)

Lundi 31 mai / jour 16
J’ai marqué tous les livres que je souhaite échanger du nom du bateau, de sa date de lecture, ainsi que la position géographique. Le prochain lecteur aura un peu de l’histoire du roman qu’il vient d’acquérir. Moi-même j’aime bien lorsque j’échange un livre y trouver le nom du propriétaire, ou même celui du bateau et son pays d’origine.

Sinon, je viens d’inventer la fougasse à la poêle ; pâte à pain, thym, lardons, olives noires. En galettes bien aplaties, un délice qui me rappelle Antibes. La pâte lève et je retarde le moment de la cuire pour humer encore la chaleur de la pâte.

Lu : L’épreuve d’une mère, Steven Mosher (bien)

Jeudi 3 juin / jour 19
Bateau, mon ami...
Comme si se faire balloter, voir valdinguer les assiettes, avoir mal au cœur, mal dormir ne suffisaient pas, voilà que ce matin la grand voile s’est déchirée lors d’un petit empannage pourtant bien préparé ; le moral des troupes est mitigé.

Nous avançons encore entre 5 et 8 nœuds par vent arrière avec juste un petit bout de foc de route… ça souffle !

PS : Vu un énorme troupeau de dauphins autour du bateau ce matin à la prise de mon quart.
PS2 : Nous nous attelons aussi à apprendre un peu de Portuguais, puisque les Açores ne sont plus qu’à 650 milles. (Et pourquoi pas Lisbonne après ?)

Lu : Parler le Portuguais en Voyage, Harrap’s

Lundi 7 juin / jour 22
On mange les préparations que maman nous avait envoyé aux Canaries : Riz parfumé recette indienne, fruits secs et lentilles corail avec un petit bouillon de légumes. C’est une très bonne idée, c’est bon et c’est joli.

Le temps est magnifique, Xavier s’impatiente mais moi je savoure ces derniers jours et je les laisse trainer encore.

Lu : la voile sauvage, de Marc Linkski (bien)

Mardi 8 juin / Jour 23
Le vent se lève, finis les heureux jours de pétole. Deux ris dans la grand voile, et nos talents d’équilibristes reviennent comme une vieille habitude.

Ce crétin d’oiseau de mer marron (que je nomme Kiou) essaye d’attraper le poulpe qui est au bout de la ligne de pêche. Il l’a déjà pris dans son bec et l’a relâché aussitôt, dégouté ! Ce fil de pêche ne nous sert de toutes manières qu’à pêcher des lambeaux de méduses.

Lu : Best tips from woman aboard (bien)

Vendredi 11 juin / Jour 26

On voit les Açores, je me réveille. Je note vite avant d’oublier.


Rêve : On était sur Goudrome, pas loin d’arriver dans un mouillage, et le vent se lève… Beaucoup de vent, le bateau s’affole. On atteint les 40 nœuds, on file tellement que la barre est toute souple, tout vrombit comme dans une voiture de course. Je regarde le GPS : panique ! 50 nœuds ! Et en plus il y a une baleine endormie sur notre chemin. On va tellement vite à côté d’elle qu’elle se réveille furieuse.
Nous sommes cramponnés à la barre et on ne sait pas bien quoi faire parce que la baleine nous poursuit. Elle nous regarde méchamment et donne un coup de queue. Elle nous loupe, et heureusement parce que le GPS affiche 60 nœuds !
Nous hurlons de joie et déchantons vite parce que nous sommes presque arrivés sur une ville avec AUCUN moyen d’arrêter le bateau.
Pas le choix, nous fonçons sur la plage et nous nous engageons sur une route, on trace comme à bord d’une voiture en enchainant les empannages et virements de bords.
On arrive dans un virage très serré, bordé de taquets et de winchs, mais évidemment on arrive rien à attraper, on vire sec… ça passe.
Le bateau décolle, et on chute sur la plage, ou plutôt, on s’échoue. Plop ! Comme une méduse. On sort en rampant du bateau, pour aller à la paillote du coin.
La femme sert des petits beignets appétissants, mais après quelques minutes ils deviennent transparents comme de la gelée de méduse et renferment un tout petit crabe figé. Alors on prend un coca et on retourne toujours en rampant, dormir dans le bateau couché à l’horizontale pour attendre la marée montante.

Toujours le 11 juin / Jour 26
Et bien nous y voilà à Horta, bien amarrés. Première étape : le célèbre bar de Peter.

6 commentaires:

  1. Merci pour cette merveille Laurène. Un rassurant sourire a accompagné ma lecture, encore encore encore je ne m'en lasse pas.
    Tout un itinéraire est déjà prévu à ton retour, mille endroit même plus à te faire decouvrir (enfin surtout pour te garder avec moi pr rattraper cette abscence)
    Cécile

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  2. quel récit , une lecture d'une traite , sans respirer, ouf....Je vous attend à gambais pour une cuisine typique terrienne ,cueillette de champignons avec les chiens , ballade a cheval dans les sous bois , (ou l'inverse..) ici rien ne bouge.....rendez vous à la rochelle ou l'ile de ré ,nous vous attendons avec impatience flo

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  3. comme si j'y etais ... j'aurai pu l'ecrire tellement j'ai le mal de mer comme toi !!! en attendant , j'ai mal aux joues d'avoir trop souri en te lisant !!! J'espere qu'on aura le temps de se faire un peu de cuisine a l'ile de Re : une bonne pizza maison avec de la buffala , des tomates cerise et du basilic frais , le tout achete le matin meme sur le marche pendant que la pate leve !!!! Mille bisous de shanghai !!!

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  4. pierre tatistcheff finike27 juin 2010 à 17:17

    tant de spontaneité et de naturel, rejouis le coeur.
    Quelle sacrée lectrice....1 à 2 bouquin par jour!!!Pierre Tatistcheff de Finike

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  5. Merci pour ce carnet de bord, un régal, on se sent moins seul quand on a partagé les mêmes galères et la pilule est un peu moins dure à avaler...
    Dis moi, tu penses pas que je devrais te rendre les magazines Neuf Mois Laurène? (lis entre les lignes, tes nombreux vomis m'interpellent en tant que Vomita professionnelle).

    Bisous à vous 2
    Céline, Ousanousava (nulle part pour le moment)

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  6. Bravo pour ces petits et grands moments que tu nous fais vivre;
    Et des gaufres faites maisons, avec du sucre glace et des tonnes de chantilly après la piz et les tomates dans l'ile de ré ? ca te dit aussi !

    a bientot tous les 2 et bienvenue chez les terriens
    les petits expo

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