On en avait ras le bol du mistral, ou c'est lui qui en a eu marre de souffler...
Le week-end est venu comme un sourire sur cette île aux yeux bleus. ça sent le printemps sur nos vélos, nous arpentons les chemins fleuris jusqu'aux petits sentiers en passant des clubs de vacances désertés par les touristes (et abandonnés par leurs propriétaires) aux criques dont les noms nous font rêver "Calla rossa", "Spiaggia Azura"...
Un réel bol d'air !
Lundi, nous sommes toutes manches relevées pour accueillir Massimo, le mécano en qui nous plaçons tous nos espoirs, mais les incessants coups de de téléphone n'y feront rien... il repousse à 14h, puis ne vient pas!
Entre temps, Xavier plonge pour récupérer l'ancre abandonnée à l'angle du quai lors du fâcheux événement.
Fier comme un coq, j'emmène ma princesse sur l'annexe qui ne se dégonfle plus (depuis que j'ai découvert que les valves étaient mal positionnées) et au bout de 100 mètres le moteur s'arrête...
Moins fier, je me démonte l'épaule à essayer de le relancer et poursuis la manœuvre à la rame contre vent et courant. (JR ne t'inquiètes pas, après avoir tout démonté, j'ai découvert que le robinet d'arrivée d'essence était bouché. Tutto a posto !)
Le lendemain, Massimo pointe le bout de son nez malade et se réjouis de savoir que j'ai trouvé un autre mécano, un vieux à la retraite qui loue des vélos au coin du port.
Dix minutes plus tard, Massimo, son pote, et le vieux débarquent sur le bateau. Concours de gendarmerie à l'italienne, c'est à celui qui aura les meilleures idées ou plutôt celui qui parle le plus. J'ai revu mon glossaire technique et je participe avec enthousiasme en imaginant le résultat magique : le moteur remis en place !
Bon, les heures et les jours passent comme des voitures à Paris. Le premier, malade, le second qui enterre un membre de sa famille, me voilà bien seul face à ce moteur à lever.
Favignana, pas une seule boutique de bricolage en vue, alors que Goudrome est au beau milieu d'un port de pêche en activité.
Nous sautons dans un ferry pour Trapani (Sicile), où nous trouvons des silentblocs (encore un mot que va aimer Vincent) presque identiques aux 4 arrachés. Un petit coup de perceuse chez Miguel (le vieux) et des heures à la lime suffiront à modifier les nouvelles pièces. Pour les reposer, il faut lever le moteur à l'aide de leviers et du poids de Laurène habilement en équilibre au bout, et quelques cales ajustées.
Des heures de gymnastique aidés de presses et de toute la panoplie à bord (et sur le pont). La drisse de grand voile sur le winch nous permet de lever l'arrière pour faire avancer le moteur de... 5 cm !
Dans nos épreuves, nous rencontrons la gentillesse des habitants quasi au quotidien; deux matins de suite les pêcheurs nous offrent du poisson fraîchement pêché, dont une superbe bonite que nous avons cuisinée mi-cuite au jus de citron. Waki, une actrice allemande qui a pris ses quartiers d'hiver ici, après un tournage sur le sol italien, se fait le porte parole des locaux qu'elle connait bien, et nous présente à tous ses amis, parmi lesquels le propriétaire du plus vieil hôtel sur l'île, qui nous propose généreusement de nous y installer.
Un soir, alors que j'allais faire souder une pièce chez Miguel, je vois Laurène au loin qui aide un voilier à accoster à couple de Goudrome; 5 italiens à bord, Francesco (le capitaine, qui parle anglais) nous propose de l'aide.
Le lendemain à 6h30, son pote boulanger surnommé "Godzilla" tant ses mains sont grandes, se plie en 4 et nous aide à positionner les supports complètement inaccessibles à l'arrière et à démonter l'arbre. Super!
La dernière fois que nous avions vu un boulanger faire de la mécanique, c'était à Manosque, pour une pièce de moto. Le type travaillait dans une pâtisserie de luxe à Paris, avant de devenir allergique à la farine.
Nos amis italiens doivent partir, le moteur est enfin en place, mais maintenant c'est l'arbre qui pose un problème : il est plié et impossible a redresser. j'ai passé plus d'une heure sous l'eau, avec des serre-joints et des tas d'outils accrochés. Rien à faire. Nous devons ressortir le bateau et cela n'est possible qu'à Trapani ! Un drame pour Laurène qui va donc devoir s'éloigner de la gelateria de la place principale et qui ne pourra pas expérimenter les autres parfums !
Un pêcheur nous aidera à sortir du port demain matin (samedi) et nous ancrerons à l'entrée du port de Trapani en attendant lundi.
A Favignana, le ciel est bleu mais nos pensées sont grises, Laurène se console en lisant l'intégralité de la bibliothèque de Jean-René, et moi je vous écris qu'il pleut dans mon cœur.
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