dimanche 8 novembre 2009

Trapani (Sicile) - Cagliari (Sardaigne)













Nous quittons enfin le chantier naval de Trapani, bientôt rejoints par Vincenzo qui nous offre un dernier cadeau lancé depuis son petit bateau : un paquet de bougies ! Il nous escortera pendant quasiment deux heures, devançant notre route vers la Sardaigne et nous démontrant ses dires de la veille, qu'à 85 ans il est "encore capable d'aller très loin des côtes et tout seul ! "


Le début de la traversée s'annonce pour le mieux mais la nuit tombe alors que de gros nuages peuplent le ciel qui s'assombrit de plus en plus vite. Il faut se rendre à l'évidence, nous sommes pris entre deux orages, et pour la petite âme sensible et facilement impressionnable que je suis (vous aurez compris que cette fois c'est Laurène qui écrit) ça s'annonce comme une nuit de calvaire.

Chacun donne au mal de mer sa cause, la règle des 5 F (faim, froid, frousse, fatigue, ... et foif ) ou bien même il paraîtrait que c'est complètement psychologique, le fait est que mon corps est tout a fait d'accord avec la vision chaotique qui s'étale devant ses yeux et répondra à cela en rendant à la mer tout ce qui atteindra mon estomac pendant les deux jours qui suivront.

Nous savions que nous étions tard dans la saison, et nous y attendions. Malgré cela, il faut bien avancer, et la traversée se rythme normalement avec alternance des quarts, et la bienveillance et l'optimisme incroyable dont sait faire preuve Xavier dans ces moments un peu durs. Il va jusqu'à préparer un petit dîner aux chandelles, avec de la musique et s'arme de toutes ses paroles réconfortantes pour tenter d'apaiser la situation.

Finalement le vent tombe et nous n'avançons plus du tout. C'est là que nous allons pouvoir enfin tester les capacités de notre beau moteur remis à neuf. Non sans une certaine appréhension, nous le démarrons, et tout va pour le mieux. Soulagement à bord !
Sur cela, et sans vouloir dépeindre un tableau apocalyptique des quarts, j'ai eu le temps d'établir une petite comparaison lorsque j'ai rencontré quelques difficultés à trouver le sommeil en la compagnie active du moteur.
Dormir en sa présence, c'est tout comme choisir un beau pommier lors d'une après midi à la campagne, pour faire la sieste en dessous, et avoir à moins de deux mètres des oreilles le propriétaire du champ qui aurait lancé à plein régime son tracteur agricole.
Fatiguée, je fais avec. point.

Au petit matin, Xavier me réveille pour me montrer un groupe de dauphins qui jouent avec le bateau. je n'en avais pas encore vus depuis le départ, et cette vision m'enchante. Ils se lassent vite de nous, nous ne sommes pas un animal bien drôle avec notre petite vitesse de moins de 2 nœuds.

Et puis enfin, au loin, un morceau de terre qui se laisse découvrir par les nuages, la promesse alléchante d'un repos bien mérité et aussi un repas salvateur pour mon estomac, qui refuse toujours en bloc de conserver quelque énergie. En consultant le pilote marine pour entrer dans le port, les noms prennent de nouvelles formes, les piazzas deviennent des pizzas, et le port Carbonara est plus qu'évocateur.
Pendant que je salive, Xavier fait un point sur la carte et j'entends prononcer cette phrase chargée de désespoir : "on avance pas, à ce train là on y sera dans 10h."

Plusieurs raisons nous poussent à être raisonnables pour le choix suivant :
- s'acharner à virer constamment et trouver du vent,
- risquer d'arriver dans la marina de nuit (les récents événements nous ayant prouvés qu'à l'avenir il faudrait éviter),
- et surtout moi, ou mon estomac, peu importe qui, mais nous crions grâce, et choisissons de s'en remettre (encore) au moteur.

Nos efforts sont récompensés par une entrée plus que réussie dans la marina de Sant Elmo, où nous goûtons au luxe d'être accueillis par le staff en zodiac, s'il vous plait, d'être guidés jusqu'à notre place de port, et enfin, d'être aidés par les voisins alentours. Avant d'aller à la capitainerie ces mêmes voisins, des anglais à bord de Volare, nous offrent une bière très fraîche, miracle d'un réfrigérateur de bord.
Nous allons de surprises en surprises : en plus d'une place bien située, à l'abri et bien attachés, nous trouvons l'électricité, l'eau, les douches, des toilettes, et ... une machine à laver ! Nous découvrons aussi qu'un tel luxe coûte cher (27 euros par nuit) mais gommera certainement notre fatigue et rechargera toutes les batteries.

Toutes mes contrariétés s'estompent autour d'une pizza telle que je l'avais fantasmée. La vieille ville semble magnifique, je suis contente de faire un peu de tourisme entre chaque de ses escales toujours trop dédiées au moteur ou au bateau (!), l'oublier un peu et reprendre un peu le sens du voyage que j'avais imaginé.

Je dresse un court bilan, sous forme d'un constat simple : ce que je préfère dans la navigation, c'est l'arrivée. Si cela est une vérité pour beaucoup de marins, elle est d'autant plus vrai que les longs trajets sont pour moi des sources d'angoisse et que je suis capable de m'en rendre malade. L'idéal reste jusqu'à présent pour moi le trajet de Favignana à Trapani, c'est à dire, une mer calme, juste ce qu'il faut de vent, du soleil, et le tout sur une distance très courte.

Encore une fois je suis impressionnée de l'accueil chaleureux entre gens de la mer. Lorsque ce n'est pas une bière offerte, c'est un autre voisin qui nous détaille les bons restaurants du coin, ou un couple de Français à l'arrêt ici pour l'hiver, ravis de venir échanger quelques mots avec nous.
C'est cela surtout qui me pousse à affronter mes peurs, et repartir de chaque port, cette envie de découvrir, d'entendre de nouvelles langues, goûter tous les mets délicieux de chaque escale, et remplir mes yeux de ces nouveaux paysages.
laurène

4 commentaires:

  1. salut la marine
    encore un peu de courage, et vs gouterez au meilleur...
    bises de la ro

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  2. salut à vous,juste pour vous dire que je reviens de l'ile de wight ou j' ai passé plus de 10 h au moteur dans 30 noeuds de vent...dans le nez!!!!(et les vagues qui vont avec)car le bateau ne connaissait pas le pré (100°bords sur bords) et le vent semblait systématiquement tourer dans la mauvaise direction.le moteur sans vent(, galère, mais le moteur avec du vent......
    continuez à bien prendre soin de voius et de votre bateaux,
    et souvenez vous de ce proverbe de marin aguérit: "quand les mouettes ont pied.....il est temps de virer!"

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  3. Une petite citation pour la route, que je trouve pleine de justesse:

    " Le véritable héroïsme n'est pas l'abscence de peur mais la canalisation de la peur vers l'action " .

    Bon vent à vous ;-)

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  4. ... pour l'avoir vécu cet été je ne suis pas surpris de voir "Claudy" aux petits soins surtout quand il s'agit de préparer un bon repas avec trois fois rien mais toujours dans la bonne humeur... santé!! nicodemo

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